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(!) Info minute – Revue de Presse

Malgré l’opposition massive des citoyens européens au gaz de schiste, la Commission Européenne persiste dans la direction opposée. Après avoir exempté ces activités d’études d’impact environnemental spécifiques, elle met en place aujourd’hui un « réseau » d’experts largement dominé par les industriels et les gouvernements favorables au gaz de schiste.

Selon les Amis de la terre Europe et le Corporate Europe Observatory, qui publient aujourd’hui une étude à ce sujet, sur 60 membres confirmés de ce réseau [1], 40% travaillent pour des entreprises comme Total, GDF Suez ou Shell, directement impliquées dans le gaz de schiste, ou pour des lobbies du secteur pétrolier et gazier [2]. Ceux qui représentent la société civile, en revanche, se comptent sur les doigts d’une main. Le reste est constitué soit de scientifiques dont la majorité est liée financièrement à l’industrie, soit de représentants de bureaux publics de recherche géologique, dont les intérêts sont souvent étroitement alignés sur ceux des promoteurs du gaz de schiste.

Le « réseau européen scientifique et technologique européen sur l’extraction des hydrocarbures non conventionnels » [3] a pour mission officielle de collecter desconsultation gaz de schiste informations sur les développements du gaz de schiste en Europe et d’évaluer les technologies utilisées pour extraire les ressources non conventionnelles, autrement dit la fracturation hydraulique et ses alternatives potentielles (pour l’instant totalement chimériques). Le tout, selon la Commission, dans le cadre d’un « échange d’idées équitable et équilibré ». L’une des cinq personnes désignées par la Commission pour présider les groupes de travail du « réseau », le Polonais Grzegorz Pieńkowski, se montre plus franc dans un entretien avec un magazine professionnel : « La mise en place [de ce réseau] est un pas en vue de renverser l’attitude défavorable ou soupçonneuse envers le gaz de schiste qui prévaut en Europe en une attitude plus pragmatique et, en dernière instance, favorable. »

Dans le cadre de la consultation publique organisée par la Commission européenne en 2013, 64% des participants estimaient que le gaz de schiste ne devait absolument pas être développé en Europe

La cause pouvait pourtant sembler entendue. Les sondages réalisés au niveau européen démontrent que l’immense majorité des personnes interrogées sont opposées au développement du gaz de schiste sur le continent [4]. Les quelques pays dont les gouvernements sont ouvertement favorables à cette industrie – la Pologne et le Royaume-Uni notamment – ont été abandonnés des multinationales pétrolières et gazières, ou sont sur le point de l’être, en raison des résistances locales et de campagnes d’exploration décevantes (voir cet article).

Passage en force

La Commission européenne s’est déjà trouvée à nombreuses reprises sous le feu des critiques pour avoir mis en place des groupes d’« experts » dominés par les intérêts Grand-Marche-Transatlantique_Illustration TAFT TTIPindustriels, que ce soit dans le domaine des OGM, des perturbateurs endocriniens, de la régulation de la finance, ou de la pollution de l’air. Ce qui ne l’empêche pas de récidiver aujourd’hui avec le gaz de schiste. Elle a directement sélectionné les cinq présidents des groupes de travail : on y retrouve deux représentants d’entreprises pétrolières et gazières (ConocoPhillips et Cuadrilla), deux représentants de gouvernements pro-gaz de schiste (Royaume-Uni et Pologne) et le Français François Kalaydjian, employé d’une organisation de recherche française liée à l’industrie et connue pour ses prises de positions favorables aux énergies fossiles, l’Institut français du pétrole [5].

Au final, une large majorité des membres du réseau, soit en personne soit à travers les entreprises, gouvernements et organisations qu’ils représentent, se sont déjà fait remarquer par leurs prises de position favorables au gaz de schiste ou par leurstop tafta opposition à des régulations trop strictes de ces activités. Interpellé par les associations, le Joint Research Center (JRC), dont la mission est de coordonner les groupes d’experts de la Commission européenne, se content de jouer avec les mots : comme il ne s’agit pas d’un groupe officiellement chargé de « conseiller » la Commission, mais seulement de rassembler des informations, il ne serait pas sujet aux normes d’équilibre et d’indépendance requises pour les autres groupes d’experts. De sorte que le JRC ne voit « aucune raison de modifier les règles ou la structure des groupes de travail ou leurs présidents ».

« Sous couvert de mettre en place un ‘réseau scientifique et technologique’, la Commission utilise des fonds publics pour créer un lobby favorable à l’industrie pétrolière et gazière, dénoncent les Amis de la terre Europe et le Corporate Europe Observatory. Ce qui est particulièrement inquiétant, c’est que malgré l’opposition massive du public, la Commission cherche une nouvelle fois à faire entrer discrètement le gaz de schiste par la porte de derrière, en essayant de faire en sorte que la question ne soit pas ‘si’ l’Europe veut la fracturation hydraulique, mais ‘comment’. »

Retrouver l’article source sur le site de l’observatoire des multinationales

[1] Le réseau compte 74 membres officiels, mais 14 sont des employés de la Commission européenne.
[2] L’Union française des industries pétrolières (UFIP) a deux représentants, dont Jean-Louis Schilansky, par ailleurs président du « Centre de documentation sur les hydrocarbures non conventionnels », le lobby récemment créé par les entreprises françaises intéressées au développement du gaz de schiste.
[3] European Science and Technology Network on Unconventional Hydrocarbon Extraction. Voir ici.
[4] Un baromètre européen de janvier 2013 montrait par exemple que seuls 9% des personnes interrogées estimaient que la production d’hydrocarbures non conventionnels devaient être priorisée. Dans le cadre de la consultation publique organisée par la Commission européenne elle-même en 2013, 64% des participants estimaient que le gaz de schiste ne devait absolument pas être développé en Europe, et 20% supplémentaires qu’il ne devait être développé qu’à conditions que des garanties sanitaires et environnementales suffisantes soient en place.
[5] Rebaptisé Institut français du pétrole – énergies nouvelles (IFP-EN) pour faire bonne mesure, mais selon François Kalaydjian, les « énergies nouvelles » semblent surtout se référer aux divers moyens de prolonger la vie des énergies fossiles, voir ici.

(!) Info minute – Revue de Presse

Le gouvernement fédéral a adopté cette semaine un projet de loi qui doit être soumis au parlement le 8 mai 2015. Il s’agit de maintenir la possibilité pour l’industrie des hydrocarbures de forer à petite échelle et le moment venu de développer un projet industriel … pourtant non rentable s’il n’est pas largement subventionné.

Le cheval de Troie de l’industrie du gaz de schiste

Des chercheurs allemands ont beau expliquer dans une récente étude[1] que l’exploitation des hydrocarbures par fracturation hydraulique en Europe n’est pas rentable, le gouvernement dirigé par la chancelière Merkel cède malgré tout au lobby des gaz de schiste.

Le porte parole Steffen Seibert rendant compte du conseil des ministres déclarait finement que le projet de loi « n’autorise pas ce qui était jusqu’à présent interdit, mais au contraire interdit beaucoup de ce qui était pour l’heure possible, comble des failles juridiques et établit des règles strictes là où il n’y avait pas de règles claires ». On pourrait se réjouir de ces dispositions restrictives si elles n’étaient l’illustration du cheval de Troie que l’industrie pétrolière maintient avec un certain succès dans plusieurs pays européens après avoir rudement bataillé en 2013 et 2014 contre l’instauration d’une directive européenne[2].

Les ministères de l’Énergie et de l’Environnement précisent que le projet de loi allemande « prévoit des interdictions dans certaines régions précises pour des questions de protection de l’eau potable, de la santé et de la nature, ainsi que des restrictions générales pour l’utilisation de la fracturation hydraulique dans les schistes, la glaise, les marnes ou les couches de charbon ». De plus il interdit l’exploitation commerciale de la fracturation hydraulique visant l’extraction des hydrocarbures dits « non conventionnels » dans des roches dures comme les schistes à des profondeurs inférieures à 3000 mètres.

L’industrie va faire mine de gémir sachant pertinemment que ce moratoire pourra être levé lorsque le contexte économique et politique s’y prêtera. En France, la prolongation de concessions et la délivrance de nouveaux permis de recherche ou leur prolongation[3] permet à leurs titulaires de maintenir une présence et de forer à tour de bras dans le bassin parisien. La zone de Champotran[4] en Seine et Marne est un exemple de l’activité en cours où les forages en grande profondeur sont effectués[11]. S’il s’agissait d’attendre un assouplissement des règles ou la délivrance d’autorisations de recherche pour stimuler la roche comme pourrait le permettre la loi de Juillet 2011, on ne s’y prendrait pas autrement.

L’Europe subventionne déjà l’industrie du gaz de schiste

Alors que l’Europe -comme le reste du monde- est face à un défi majeur concernant ses émissions de gaz à effet de serre et tandis que Paris doit accueillir la vingt et unièmeCheval_de_Troie_stop_gaz_de_schiste conférence internationale sur le Climat (COP 21) au mois de décembre 2015, l’industrie des hydrocarbures continue à bénéficier de nouvelles subventions. Dans le cadre du « programme Horizon 2020 » un fonds de recherche européen[5] propose en effet une aide de 113 millions d’euros aux entreprises qui exploitent le gaz de schiste. Autre exemple, en 2014 la société Baltic Ceramics a reçu un financement de 11 millions de dollars de l’Union européenne , et un autre de 4 millions de dollars de fonds publics de la Pologne « pour stimuler l’innovation » dans le cadre du développement d’une usine de production de billes. Cette société prévoit en effet de produire des agents de soutènement en céramique, des billes sphériques minuscules et presque indestructibles qui sont injectées sous terre lors des opérations de fracturation hydraulique mises en œuvre pour libérer les hydrocarbures (pétroles ou gaz de schiste) piégés dans la roche mère[6].

Rappelons qu’aux États-Unis où a eu lieu le « boom du gaz de schiste », la production massive d’hydrocarbures non conventionnels a été possible d’une part parce que la géologie y était très favorable dans un pays gigantesque avec une faible pression démographique mais aussi parce que les pouvoirs public étaient peu regardants sur les pratiques de l’industrie dans une situation très peu règlementée (avec les conséquences sanitaires et environnementales que l’on connaît). Par ailleurs les cadeaux fiscaux faits par les États aux opérateurs du secteur de la production pétrolière et gazière sont autant de subventions qui ont donné l’illusion d’une production économiquement rentable[7].

2017, attention à la reprise !

Malgré les récentes déconvenues des majors en Pologne, en Roumanie, en Ukraine (où les recherches s’avèrent très peu fructueuses et ne confirment pas les espérances d’un « eldorado européen des gaz de schiste », lesquels sont emprisonnés dans des systèmes géologiques capricieux et résistants), l’industrie n’a pas dit son dernier mot. Bien déterminées à essorer tout ce que notre planète contient d’hydrocarbures, et face à la baisse actuelle des cours du pétrole, les grosses compagnies réduisent les opérations à risque (dont la recherche) et débauchent à tour de bras pour continuer de gâter leurs actionnaires. Mais ceci est temporaire et même avec le retour de l’Iran, il est difficile d’imaginer que le pétrole pas cher sera durable.

Si la situation s’avère très tendue voire désastreuse pour certains opérateurs aux États-Unis et alors que la production de pétrole ainsi que le nombre de nouveaux forages commencent à baisser[8], la santé financière des majors reste outrageusement bénéficiaire. Et le secteur est prêt à augmenter la production et relancer les forages dès que l’Arabie Saoudite aura cessé sa pression.

On peut donc imaginer qu’après les élections américaines (dont les candidats sont massivement financés par l’industrie fossile), et quelques soit les engagements des États-Unis en matière d’émissions de carbone et de gaz à effet de serre, que le ou la présidente aura une dette vis-à-vis de ses « mécènes ». Il sera alors de bon ton de répéter des deux côtés de l’Atlantique que « le gaz de schiste est une énergie de transition ».

On peut également penser, et sans faire preuve d’une très grande imagination, que la même chose se prépare pour 2017 en France. En 2011, il a été demandé à l’industrie pétrolière d’être patiente. Une loi d’interdiction de la fracturation hydraulique a étémanifestation-contre-l-exploitation-du-gaz-de-schiste-a-donzere-le-16-avril-2011 votée pour éteindre la contestation. Le lobby du pétrole et du gaz de schiste un peu déçu pensait que « la blague » serait de courte durée mais François Hollande a (jusqu’à présent) maintenu son engagement de ne pas autoriser l’exploitation du gaz de schiste. Il ne serait donc pas surprenant, et quelle que soit l’équipe qui occupera l’Élysée et Matignon, qu’à partir de 2017 l’offensive des pétroliers soit massive. Entre temps, le lobby de l’énergie fossile au premier rang duquel figurent les industriels, travaille déjà à l’acceptation sociale avec la publication de nombreux articles dans les journaux, la mise en fonction de son « centre d’information sur les hydrocarbures non conventionnels » et le « recrutement » de « modèles sociaux » tels que la navigatrice Maud Fontenoy[9]. D’ores et déjà, le marketing social du gaz de schiste est engagé.

Non, les hydrocarbures non conventionnels ne sont pas une énergie de transition[10] !

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[1]  Allemagne, Europe, l’exploitation des hydrocarbures par fracturation hydraulique n’est pas rentable https://stopgazdeschiste.org/2015/03/21/allemagne-europe-lexploitation-des-hydrocarbures-par-fracturation-hydraulique-nest-pas-rentable-etude/
[2] La commission européenne baisse les bras sur les gaz de schiste http://www.euractiv.fr/sections/energie/la-commission-baisse-les-bras-sur-le-gaz-de-schiste-269574/
[3] http://www.romandie.com/news/Petrole-prolongation-dune-concession-du-canadien-Vermilion-en-Gironde/581058.rom/
[4] Voir les pages 13 et 14 du bulletin mensuel de février 2015 du bureau exploration-production des hydrocarbures (BEPH), DGEC du Ministère en charge de l’Énergie et de l’Écologie http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Bull-beph_02_2015.pdf/
[5] L’UE a commencé à subventionner le gaz de schiste http://www.euractiv.fr/sections/energie/lue-commence-subventionner-le-gaz-de-schiste-302801/
[6] Pologne: Une usine de fabrication de billes de céramique pour le fracking en Europe financée par l’Union Européenne https://stopgazdeschiste.org/2014/05/27/pologne-une-usine-de-fabrication-de-billes-de-ceramique-pour-le-fracking-en-europe-financee-par-lunion-europeenne/
[7] Ce qu’on ne dit pas sur le miracle gazier américain http://m.lesechos.fr/redirect_article.php?id=0202464816336/
[8] Chute de la production américaine de pétrole http://petrole.blog.lemonde.fr/2015/04/02/chute-de-la-production-americaine-de-petrole/
[9] Énergie : Jean Jouzel et Corinne Lepage ne partagent pas l’analyse de Maud Fontenoy http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/technologies-de-l-energie-thematique_89428/energie-jean-jouzel-et-corinne-lepage-ne-partagent-pas-l-analyse-de-maud-fontenoy-article_293465/
[10] Pourquoi le gaz de schiste n’est pas une énergie de transition https://stopgazdeschiste.org/pourquoi-le-gaz-de-schiste-nest-pas-une-energie-de-transition/
[11] http://colfertois.canalblog.com/archives/2015/04/04/31833721.html

Un accord commercial majeur, en cours de négociation, entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis (US) menace les pouvoirs dont disposent les gouvernements pour protéger les populations et l’environnement des nouvelles technologies à risque telles que la fracturation hydraulique (fracking en anglais). A la veille des rassemblements qui se tiendront le 11 octobre 2014, et suite aux parties 1, 2, 3 et 4, nous publions le cinquième et dernier épisode qui conclut sur le risque d’un droit excessif pour les entreprises.

Des risques bien au-delà des privilèges pour les investisseurs

Le développement des gaz de schiste donne l’opportunité aux États-Unis de devenir, pour la première fois, un important exportateur de gaz naturel. Les États membres de l’UE, qui produisent peu de gaz naturel, aimeraient en importer des États-Unis. L’industrie du gaz souhaite exporter du gaz de schiste américain vers l’Europe, où elle peut le facturer environ trois fois plus qu’aux États-Unis. Le PTCI faciliterait les exportations de gaz naturel liquéfié (GNL) des États-Unis vers l’UE. En fait, si le PTCI comprend ce qui est appelé « le traitement national pour le commerce du gaz naturel », le Département de l’énergie des États-Unis serait légalement tenu d’approuver automatiquement les exportations de GNL des États-Unis vers l’UE sans même en examiner les impacts. L’UE va encore plus loin, en demandant un accès rapide au gaz des États-Unis (et au pétrole et au charbon), en proposant de nouveaux termes selon lesquels les gouvernements des États-Unis et de l’UE ne seraient pas en mesure de restreindre les exportations de charbon, de pétrole ou de gaz.

L’augmentation des exportations de GNL menacerait notre environnement et le climat de nombreuses façons

L’augmentation de l’utilisation de la fracturation hydraulique : l’exportation de gaz naturel encourage l’augmentation de la production de gaz, dont la plupart provient de sources de gaz non conventionnels, qui nécessitent presque toujours l’utilisation de la fracturation hydraulique.

L’aggravation des dérèglements climatiques : le GNL est un carburant à forte intensité en carbone, avecun déluge de disputes des émissions tout au long du cycle de production nettement supérieures à celles du gaz naturel. L’énergie nécessaire pour refroidir, liquéfier et stocker le gaz naturel pour l’expédier par les océans rend le GNL plus intensif en énergie, et en gaz à effets de serre, que le gaz naturel ordinaire. Ouvrir des réserves de gaz naturel à des exportations illimitées augmentera la dépendance aux  énergies fossiles avec des impacts significatifs sur le climat.

Une dépendance accrue aux infrastructures d’énergies fossiles, augmentant les émissions de méthane : les exportations de GNL requièrent une infrastructure industrielle, notamment un nouveau réseau de puits, des terminaux, des usines de liquéfaction et de regazéification, des gazoducs et des compresseurs. Cette infrastructure génère des fuites de méthane, un gaz à effet de serre quatre-vingt six fois plus puissant que le CO2 sur une période de vingt ans(33). Par conséquent, l’intensification des exportations est susceptible d’augmenter les émissions de méthane et d’aggraver les dérèglements climatiques.

Malgré le caractère critique de ces implications politiques, dans le cadre du PTCI, les pays ne seraient plus en mesure de contrôler ou de gérer les niveaux d’importation de gaz naturel, enfermant les États-Unis et l’UE dans une dépendance accrue aux énergies fossiles.

le diable est dans les détails commerciaux TAFTA

Conclusion : Non aux droits excessifs pour le secteur privé dans le PTCI

Le projet d’’accord transatlantique va bien au-delà des questions commerciales traditionnelles. Il pourrait STOP TAFTA-avoir de graves conséquences sur les réglementations publiques qui vont dans l’intérêt des citoyens et de l’environnement. Cela est d’autant plus préoccupant que le PTCI est conçu comme un modèle pour les accords commerciaux et d’investissement à venir, un modèle que des entreprises multinationales telles que Chevron espèrent voir reproduit à l’échelle mondiale. Les activités pétrolières et gazières sont des investissements risqués qui peuvent avoir des impacts irréversibles sur les populations locales et l’environnement. C’est le rôle des pouvoirs publics de protéger les populations contre de tels impacts et veiller à ce que les entreprises paient des indemnités en cas de dommages. L’octroi de droits spéciaux et excessifs aux investisseurs a un effet inverse, puisque le risque d’investissement est transféré aux contribuables et à la société dans son ensemble. Les gouvernements pourraient être contraints d’indemniser des entreprises suite à des décisions prises pour protéger les populations et l’environnement.

“Les entreprises tentent d’obtenir par la ruse – par des accords commerciaux négociés secrètement– ce qu’elles ne pouvaient atteindre dans un processus politique ouvert.” Joseph Stiglitz, lauréat du prix Nobel d’économie(37)

La bataille actuelle sur la réglementation de la fracturation hydraulique fournit un exemple clair de ce qui est en jeu. Les tribunaux internationaux d’arbitrage sont déjà utilisés pour contester un moratoire sur la fracturation hydraulique au Québec. Il fait peu de doute que si un tel dispositif était inclus dans les accords commerciaux entre les États-Unis et l’UE et entre l’UE et le Canada, la protection des investisseurs serait à nouveau mobilisée pour contester d’autres interdictions et réglementations de la fracturation hydraulique, que ce soit au niveau local ou national.

Les gouvernements pourraient être ébranlés par des tribunaux d’arbitrage, permettant aux entreprises de contester des décisions prises démocratiquement et visant à protéger les populations et l’environnement. L’enthousiasme pour les accords commerciaux contenant des clauses de ce type et, plus inquiétant encore, leur utilisation croissante par les entreprises, montrent que ce risque est réel.

Pour éviter des crises environnementales et climatiques catastrophiques, il faut résister à cette tendance-là, y compris au nom de la démocratie. La première étape consiste à s’opposer à toute inclusion de dangereux mécanismes de règlement des différends investisseur-État dans les projets d’accords entre l’Union européenne et les États-Unis et le Canada.

(36) Une annexe au projet de texte de l’AECG qui a fuité en novembre 2013 précise que des mesures de bonne-foi, non-discriminatoires, pour protéger la santé, la sécurité et l’environnement ne constituent pas une expropriation indirecte et ne seraient donc pas indemnisables. Toutefois, ce texte comprend également le principe de la nation la plus favorisée qui pourrait permettre aux investisseurs d’importer des clauses d’expropriation d’autres traités d’investissement, ne comportant
pas ces exceptions de politique publique, dans le cadre de différends menés sour l’AECG, rendant l’annexe relativement vide de sens.

(!) Info minute – Revue de Presse

Un accord commercial majeur, en cours de négociation, entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis (US) menace les pouvoirs dont disposent les gouvernements pour protéger les populations et l’environnement des nouvelles technologies à risque telles que la fracturation hydraulique (fracking en anglais). A la veille des rassemblements qui se tiendront le 11 octobre 2014, et suite aux parties 1, 2 et 3, nous publions le quatrième épisode qui porte la pression exercée par les pollueurs pour obtenir des droits spéciaux.

Les pollueurs font pression pour obtenir des droits spéciaux

Il ne faut pas s’étonner que des géants de l’énergie comme l’entreprise américaine Chevron fasse pression pour « un chapitre sur l’investissement d’envergure internationale » dans le PTCI. L’entreprise, qui conseille officiellement le représentant au Commerce des États-Unis, a consacré l’intégralité de sa réponse(18) à la consultation organisée par le gouvernement américain à la protection des investissements. « L’un de nos problèmes les plus importants à l’échelle mondiale » a-t-elle indiqué. Chevron est actuellement engagé dans une bataille sur un arbitrage controversé contre l’Équateur, cherchant à éviter de payer 9,5 milliards de dollars pour nettoyer les pollutions liées à des forages pétroliers dans la forêt amazonienne,comme l’avait ordonné la justice équatorienne(19). L’affaire a été fustigée comme « un détournement flagrant »(20) du chapitre sur la protection des investissements pour échapper à la justice. Selon l’entreprise, le chapitre sur la protection des investissements du PTCI devrait obliger les gouvernements à « s’abstenir de porter atteinte aux attentes légitimes de retour sur investissement ».

Chevron aux négociateurs américains.

Si Chevron obtient ce qu’elle veut, les entreprises qui exploitent les énergies fossiles non conventionnelles verraient leurs risques d’investissement quasiment réduits à zéro. Si les populations concernées se prononcent contre la fracturation, ou si le gouvernement annule des permis, au final, c’est le contribuable qui pourrait payer la note. Les faits montrent que la simple menace d’un conflit Investisseur-État peut avoir un effet paralysant sur la volonté des gouvernements de réglementer. Les entreprises utilisent la menace de poursuites judiciaires pour tuer dans l’œuf toute législation. Les pays qui ont des projets d’extraction d’énergies fossiles non conventionnelles, ou qui manquent d’un cadre juridique de protection solide, sont particulièrement en danger. Les populations, qui subissent les effets négatifs de l’extraction d’énergies sales sur leur santé et l’environnement, n’auront aucun droit pour se défendre.

DES GOUVERNEMENTS VULNÉRABLES AUX ARBITRAGES ENTRE INVESTISSEURS ET ÉTATS

Une déclaration transatlantique des droits des multinationales

Le gouvernement américain et la Commission européenne semblent déterminés à introduire un mécanisme investisseur-État dans le PTCI. Le représentant américain au commerce a fait des « procédures de règlement des différends entre les investisseurs des États-Unis, l’UE et ses États membres » l’un de ses principaux objectifs, lorsqu’il a informé le Congrès américain(29). Le mandat de négociation de l’UE, qui a fuité, fait référence à un « mécanisme de règlement des différends investisseur-État ultramoderne » et à des droits des investisseurs d’une grande portée (voir tableau 1)(30).

Des dispositions similaires sont également incluses dans l’accord commercial AECG entre le Canada et l’UE, considéré comme un modèle à suivre pour le PTCI. Malgré les démentis officiels(31), les droits des investisseurs conférés par cet accord mettront les politiques en danger et sont susceptibles de créer un effet dissuasif sur de nouvelles règles visant à protéger l’environnement et les populations (voir tableau 1). S’il est ratifié, cet accord sera le premier accord à l’échelle européenne donnant aux investisseurs étrangers des droits d’une si grande portée. Même en cas d’annulation par l’une des parties, ceux-ci resteront en vigueur pendant 20 ans. Pas étonnant que des spécialistes miniers célèbrent l’AECG comme un accord « qui fera date » et qui pourrait avoir « des implications majeures pour le secteur minier »(32).

⇒ à suivre dans le prochain et dernier épisode ce que les entreprises tentent d’obtenir par la ruse dans le cadre de négociations tenues secrètes.

(18) http://www.regulations.gov/#!documentDetail;D=USTR-2013-0019-0054
(19) http://www.chevron.com/ecuador/
(20) Voir le site http://chevrontoxico.com/. Pour la version de Chevron sur cette histoire, voir http://www.theamazonpost.com/
(21) http://www.mineweb.com/mineweb/content/en/mineweb-political-economy?oid=209783&sn=Detail
(22) http://unctad.org/en/PublicationsLibrary/webdiaepcb2013d3_en.pdf
(23) http://www.state.gov/s/l/c3741.htm  http://www.theglobeandmail.com/globe-investor/quebecs-st-lawrence-fracking-
ban-challenged-under-nafta/article5577331/
(24) http://www.ips-dc.org/files/6061/Mining%20for%20Profits%202013%20-%20ENGLISH.pdf, p1
(25) https://www.fas.org/sgp/crs/misc/RS21118.pdf
(26) Bulgaria, Croatia, Czech Republic, Estonia, Latvia, Lithuania, Poland, Romania and Slovakia.
(27) https://www.citizen.org/TAFTA-investment-map
(28) http://www.oecd.org/daf/inv/investment-policy/ISDSconsultationcomments_web.pdf, p19
(29) http://www.ustr.gov/sites/default/files/03202013%20TTIP%20Notification%20Letter.PDF
(30) http://www.s2bnetwork.org/fileadmin/dateien/downloads/EU-TTIP-Mandate-from-bfmtv-June17-2013.pdf
(31) Réponse du réseau Seattle to Brussels aux prétentions de la DG Commerce sur les mécanismes d’arbitrage investisseur-État http://www.tni.org/article/s2b-refutes-european-commissions-defense-controversial-investor-state-dispute-settlement?context=70931
(32) http://www.mineweb.com/mineweb/content/en/mineweb-political-economy?oid=209783&sn=Detail

(!) Info minute – Revue de Presse

Un accord commercial majeur, en cours de négociation, entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis (US) menace les pouvoirs dont disposent les gouvernements pour protéger les populations et l’environnement des nouvelles technologies à risque telles que la fracturation hydraulique (fracking en anglais). A la veille des rassemblements qui se tiendront le 11 octobre 2014, et suite aux parties 1 et 2, nous publions le troisième épisode qui porte sur la mobilisation des entreprises contre les interdictions en Europe et le mécanisme de règlement des différends investisseur-État prévu par les Accords.

PAS DE CADRE RÉGLEMENTAIRE EUROPÉEN POUR COMBUSTRILES FOSSILES NON CONVENTIONNELS
Les entreprises se mobilisent contre les interdictions en Europe

De puissantes entreprises se mobilisent en permanence contre les tentatives nationales et européennes de réglementation de la fracturation hydraulique. En 2011, suite au vote de la loi d’interdiction de la fracturation hydraulique en France, les permis de l’entreprise pétrolière et gazière américaine Schuepbach et de l’entreprise multinationale française Total ont été annulés. Chacune des deux entreprises a déposé un recours en justice contre l’État français afin de récupérer leurs permis respectifs. Total a affirmé qu’il respecterait la loi française et n’utiliserait pas la fracturation hydraulique. Les deux affaires judiciaires sont toujours en cours d’instruction par les tribunaux français. Schuepbach a par ailleurs contesté la loi d’interdiction pour non-conformité à la Constitution. Le Conseil constitutionnel français s’est prononcé contre l’entreprise, en faisant valoir que l’interdiction était un moyen valable et approprié de protection de l’environnement.

Les entreprises de l’énergie regardent déjà du côté de la justice pour revenir sur les interdictions de la fracturation hydraulique. L’inclusion d’un mécanisme de règlement des différends investisseur-État dans le PTCI leur donnerait un outil extra-juridique – et dans certains cas une seconde chance – pour contester des politiques d’intérêt public.

“Les entreprises transnationales du secteur extractif se tournent de plus en plus vers les tribunaux d’arbitrage internationaux pour résoudre les conflits portant sur les ressources naturelles.” [Institute for Policy Studies in its report Mining for Profits in International Tribunals (14)].

Le mécanisme de règlement des différends investisseur-État : le plan B du secteur privé pour briser la résistance contre la fracturation hydraulique

On peut s’attendre à ce que le chapitre sur l’investissement du PTCI inclut des droits considérables pour les investisseurs étrangers qui pourraient saper les décisions des gouvernements visant à interdire ou réglementer la fracturation hydraulique. Les entreprises américaines qui investissent en Europe pourraient contester directement les interdictions et réglementations de la fracturation hydraulique devant des tribunaux internationaux privés, ce qui pourrait ouvrir la voie à des dizaines de millions d’euros de compensation, payés par les contribuables européens. Les entreprises européennes qui investissent aux États-Unis pourraient également être en mesure de contester les réglementations fédérales ou des États américains portant sur la fracturation hydraulique.

Le mécanisme de règlement des différends investisseur-État est de plus en plus utilisé par les entreprises minières et de l’énergie pour contester les politiques de santé publique et environnementales, qu’elles considèrent comme responsables de la réduction de la valeur de leurs investissements, c’est à dire de leurs bénéfices attendus.
Le cas Lone Pine est inquiétant car il montre comment des gouvernements peuvent être vulnérables aux litiges investisseur-État liés à la fracturation hydraulique ou à d’autres projets énergétiques et miniers controversés. Les entreprises désireuses d’extraire des énergies fossiles non conventionnelles en Europe pourraient être en mesure de contester les mesures prises dans l’intérêt public dès lors qu’elles ont une filiale aux États-Unis. Plusieurs entreprises américaines, telles que Chevron et Conoco Philips, sont impliquées dans des projets d’extraction d’énergies fossiles non conventionnelles en Europe. Les entreprises qui investissent aux États-Unis avec une filiale dans un pays de l’UE auraient les mêmes droits. Un mécanisme de règlement des différends investisseur-État dans le PTCI mettrait en danger les populations européennes et américaines, et il compromettrait la capacité des pouvoirs publics de réglementer ou interdire les pratiques dangereuses telles que la fracturation hydraulique.

Un solide régime de protection des investissements nous permettrait, à nous et d’autres entreprises américaines, de mieux réduire les risques associés à des investissements étrangers à grande échelle, à forte intensité en capital et à long terme.” [Chevron, Réponse de Chevron au consultation par le gouvernement des ÉU sur le PTCI(17)]

DROITS DES INVESTISSEURS AU-DESSUS DE LA DÉMOCRATIE  LONE PINE CONTRE LE CANADA

⇒ à suivre prochain épisode sur la pression exercée par les pollueurs pour obtenir des droits spéciaux.

(10) http://europa.eu/legislation_summaries/glossary/subsidiarity_en.htm
(11) DG Environment study, 2012, “Support to the identification of potential risks for the environment and human health arising from hydrocarbons operations involving hydraulic fracturing in Europe” http://ec.europa.eu/environment/integration/energy/pdf/fracking%20study.pdf
DG Environment study, 2013, “Regulatory provisions governing key aspects of unconventional gas development in eight Member States” http://ec.europa.eu/environment/integration/energy/pdf/Final%20Report%2024072013.pdf
(12) European Parliament, 2012, “Own Initiative report on the environmental impacts of shale gas and shale oil extraction activities” http://www.europarl.europa.eu/oeil/popups/ficheprocedure.do?reference=2011/2308(INI)
European Parliament, 2012, “Own initiative report on industrial, energy and other aspects of shale gas and oil” http://www.europarl.europa.eu/oeil/popups/ficheprocedure.do?reference=2011/2309(INI)
(13) http://ec.europa.eu/environment/integration/energy/unconventional_en.htm
(14) http://www.ips-dc.org/files/6061/Mining%20for%20Profits%202013%20-%20ENGLISH.pdf, p1
(15) http://www.italaw.com/sites/default/files/case-documents/italaw1596.pdf
(16).http://www.theglobeandmail.com/globe-investor/quebecs-st-lawrence-fracking-ban-challenged-under-nafta/article5577331/
(17) Chevron Corporation: Comments on Proposed Transatlantic Trade and Investment Partnership, May 7, 2013, http://www.regulations.gov/#!documentDetail;D=US TR-2013-0019-0241

(!) Info minute – Revue de Presse

Un accord commercial majeur, en cours de négociation, entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis (US) menace les pouvoirs dont disposent les gouvernements pour protéger les populations et l’environnement des nouvelles technologies à risque telles que la fracturation hydraulique (fracking en anglais). A la veille des rassemblements qui se tiendront le 11 octobre 2014, et suite à la première partie, nous publions le deuxième épisode qui porte sur l’opposition croissante à la fracturation hydraulique aux États-Unis et en Europe.

Aux États-Unis, une opposition croissante à la fracturation hydraulique

L’usage de la fracturation hydraulique est très répandu aux États-Unis. L’industrie pétrolière et gazière en fait l’usage – ou prévoit de le faire – dans 31 États, avec plus de 500 000 puits de gaz naturel actifs à travers le pays. Les États les plus concernés sont : la Pennsylvanie, l’Ohio, la Virginie Occidentale, l’Oklahoma et le Texas. L’usage de la fracturation hydraulique et la production de gaz naturel sont très faiblement réglementés, à la fois au niveau fédéral et au niveau de chaque État. Au niveau fédéral, l’industrie pétrolière et gazière est exonérée de sept grandes lois sur l’environnement, dont la loi sur l’eau potable, la loi sur l’air et la loi sur la protection de l’eau.

L’opposition grandissante a conduit des centaines de villes à faire voter des interdictions ou des moratoires sur la fracturation hydraulique.

La fracturation hydraulique est un procédé intrinsèquement dangereux, faisant de l’absence de réglementation efficace une recette propice aux désastres écologiques et sociaux. Des millions d’Américains vivent, travaillent et vont à l’école près de puits de gaz naturel et de gazoducs. De plus en plus de preuves attestent que la production de gaz, notamment l’utilisation de la fracturation hydraulique et le traitement des déchets, contamine l’eau potable, l’air et le sol, détruisant le climat et provoquant des tremblements de terre. Ce qui engendre des risques et des effets préoccupants sur la santé des populations concernées aux États-Unis.

Au niveau local, l’opposition populaire grandissante contre la fracturation hydraulique a conduit des centaines de villes et villages à faire voter des interdictions ou des moratoires sur la fracturation hydraulique.

Compte tenu de la nécessité de protéger les populations américaines, il est essentiel que le PTCI ne compromette pas les efforts pour renforcer la réglementation encadrant l’industrie du gaz naturel, qui vise notamment à combler les lacunes existantes et à introduire des interdictions et des moratoires sur la fracturation hydraulique.

fracturation hydraulique et résistances aux Etats-Unis fracking

Cette carte reflète notre état de connaissance de la situation aux États-Unis au moment de l’élaboration de ce document (mars 2014)

En Europe, les citoyens disent « Non » à la fracturation hydraulique

L’opposition à la fracturation hydraulique se propage à travers l’Europe alors que les citoyens sont de plus en plus informés des risques encourus. Un sentiment croissant de méfiance ainsi que des signes de résistance sont visibles dans tous les pays européens où l’utilisation de la fracturation hydraulique est envisagée ou déjà en cours(7). Plusieurs gouvernements ont répondu à ces inquiétudes publiques par des moratoires, des interdictions de fait ou des régulations environnementales renforcées(8).

Les mobilisations citoyennes à travers l’Europe ont abouti à l’interdiction de la fracturation hydraulique, à des moratoires et à des cadres réglementaires renforcés.

Bien que des projets d’exploration d’hydrocarbures non conventionnels soient en cours au Royaume-Uni, en Pologne et en Roumanie(9), la France et la Bulgarie ont interdit la fracturation hydraulique, et plusieurs autres pays ont temporairement bloqué son utilisation. L’Autriche et la Lituanie ont renforcé leurs cadres réglementaires.      à suivre prochain épisode sur la mobilisation des entreprises contre les interdictions en Europe.

principale ressources de gaz non conventionnel en Europe gaz de schiste

(7) Un EuroBaromètre de janvier 2012 a montré que « 74 % des Européens seraient inquiets si un projet de gaz de schiste arrivée dans leur région » et que « 9 % pensent que la production de combustibles fossiles non conventionnels devrait devenir une priorité ». (http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/flash_arch_360_345_en.htm#360)
La consultation publique européenne de 2013 organisée par la Commission européenne a montré que 64% des participants pensent que les hydrocarbures non conventionnels « ne doivent pas être développés en Europe du tout », tandis que 20 % des participants pensent que les hydrocarbures non conventionnels « devraient être développées en Europe à condition que des mesures de protection de la santé et de l’environnement soient mises en œuvre ». (http://ec.europa.eu/environment/integration/energy/pdf/Shale%20gas%20consultation_report.pdf)
(8) Comme en France, la Bulgarie, l’Allemagne, l’Irlande, République tchèque, Danemark, Pays-Bas, l’Autriche, la Lituanie
(9) http://www.foeeurope.org/Solidarity-with-Pungesti-071213

(!) Info minute – Revue de Presse

Un accord commercial majeur, en cours de négociation, entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis (US) menace les pouvoirs dont disposent les gouvernements pour protéger les populations et l’environnement des nouvelles technologies à risque telles que la fracturation hydraulique (fracking en anglais). A la veille des rassemblements qui se tiendront le 11 octobre 2014, nous publions en cinq épisodes le document élaboré au printemps par plusieurs organisations qui soutiennent également le combat contre le développement de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures non-conventionnels(i)

Le Partenariat Transatlantique de Commerce et d’Investissement(1) (PTCI) couvre un très large éventail de questions et de secteurs, y compris la sécurité alimentaire, les organismes génétiquement modifiés, les produits chimiques, les combustibles très polluants et la protection des données. Dans l’intérêt du secteur privé, les négociations risquent d’affaiblir, voire même de revenir sur des mesures de protection décidées démocratiquement et mises en œuvre pour protéger l’environnement et les citoyens.

Il est à craindre que les négociations privilégient la protection des investissements du secteur privé aux mesures de protection en faveur des citoyens et de l’environnement, permettant aux entreprises de solliciter des dédommagements lorsque les décisions gouvernementales affectent leurs bénéfices. Ceci pourrait favoriser les intérêts des entreprises désireuses d’exploiter les ressources naturelles par l’intermédiaire de technologies dangereuses et dont les activités pourraient être concernées par des réglementations environnementales ou de santé.

La fracturation hydraulique est utilisée pour extraire des combustibles fossiles non conventionnels difficiles d’accès, tels que les gaz et pétrole de schiste, le tight gas et le gaz de couche. Cette technologie permet d’accroître la quantité de ressources de gaz qu’il est possible d’extraire, contribuant à notre dépendance aux énergies fossiles pour plusieurs décennies.
Les dangers et les effets environnementaux et sanitaires de la fracturation hydraulique sont de mieux en mieux documentés, conduisant à une opposition croissante des populations concernées, à la fois dans les pays de l’UE et aux États-Unis.

stop taftaCe rapport analyse comment le PTCI pourrait limiter la capacité des gouvernements à réglementer le développement et l’expansion de l’exploitation des hydrocarbures de schiste. Il fait valoir que le PTCI pourrait dangereusement contrecarrer les efforts pour lutter contre les dérèglements climatiques et pour protéger les populations. Le PTCI pourrait étendre l’utilisation de la fracturation hydraulique en retirant aux pouvoirs publics leurs capacités de contrôle des exportations de gaz naturel. Les États pourraient être obligés de dédommager des entreprises à hauteur de millions d’euros pour
compenser les baisses de profits dues à l’entrée en vigueur de réglementations.
Ce rapport appelle l’UE et les États-Unis à exclure le mécanisme de règlement des différends investisseur-État des négociations, ainsi que des autres accords en cours de négociations,
notamment l’accord économique et commercial global UE-Canada (AECG)(2).

Le Chapitre sur l’investissement du PTCI : Protection des investissements, menaces sur la démocratie

Il est à craindre que davantage de droits soient donnés au secteur privé par le biais d’une clause appelée « mécanisme de règlement des différends investisseur-État » (ISDS pour l’acronyme anglais). L’inclusion de cette clause dans l’accord permettrait aux entreprises de réclamer des dommages et intérêts devant des tribunaux privés/à l’abri des regards, des tribunaux d’arbitrage, si elles estiment que leurs bénéfices sont affectés par des changements de réglementation ou de politique. Des lois démocratiquement décidées pour protéger les populations et l’environnement seraient ainsi menacées.

Les entreprises qui prétendent que leurs investissements (y compris les prévisions de bénéfices futurs) sont touchés par un changement dans les politiques gouvernementales auraient le droit de solliciter une indemnisation auprès de tribunaux internationaux privés. Les entreprises américaines (ou toute entreprise avec une filiale aux États-Unis) qui investiraient en Europe pourraient utiliser ces droits, d’une grande portée, pour réclamer des dédommagements en compensation de futures réglementations ou interdictions de la fracturation hydraulique. Ces tribunaux ne font pas partie du système judiciaire normal. Ils sont spécifiquement mis en place pour des affaires d’investissement. Les arbitres ont une forte tendance à privilégier les investisseurs(3) et ils n’ont aucune connaissance spécifique sur le climat ou la fracturation hydraulique. Les entreprises privées utilisent déjà les accords d’investissement existants pour réclamer des dommages et intérêts aux États, et ce sont les contribuables qui paient la note.

Le mécanisme de règlement des différends investisseur-État est de plus en plus controversé dans un contexte où des entreprises minières et énergétiques l’utilisent pour contester des politiques publiques. Le géant suédois de l’énergie Vattenfall réclame plus de 3,7 milliards d’euros à l’Allemagne en compensation de la décision du pays de sortir du nucléaire(4). Pacific Rim, une entreprise minière basée au Canada réclame 315 millions de dollars au Salvador dont le gouvernement a refusé de lui octroyer un permis pour un projet(5) de mine d’or potentiellement dévastateur.
Enfin, Lone Pine Resources poursuit le Canada et lui réclame 250 millions de dollars suite à l’introduction d’un moratoire sur la fracturation hydraulique décidé au Québec (nous en reparlerons)(6).          A suivre

les dangers de la fracturation hydraulique

à suivre prochain épisode sur l’opposition croissante à la fracturation hydraulique aux États-Unis et en Europe.

(i) Ce document a été préparé par : Natacha Cingotti (Amis de la Terre Europe); Pia Eberhardt (Corporate Europe Observatory), Timothé Feodoroff (Transnational Institute), Antoine Simon (Amis de la Terre Europe), Ilana Solomon (Sierra Club), avec des contributions de : Maxime Combes (ATTAC France), Paul de Clerck (Amis de la Terre Europe), Peter Fuchs (Powershift), Pietje Vervest (Transnational Institute) et la version originale éditée par : Helen Burley

(1) Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI) est la traduction du terme Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP). Le sigle TAFTA (Transatlantic Free Trade Agreement) est également utilisé, comme le terme « grand marché transatlantique ».
(2) http://www.tni.org/sites/www.tni.org/files/download/ceta-fracking-briefingen.pdf
(3) http://www.tni.org/briefing/profiting-injustice
(4) http://www.tni.org/sites/www.tni.org/files/download/vattenfall-icsid-case_oct2013.pdf
(5) https://www.citizen.org/documents/Pacific_Rim_Backgrounder1.pdf
(6) http://www.canadians.org/media/lone-pine-resources-files-outrageous-nafta-lawsuit-against-fracking-ban

(!) Info minute – Revue de Presse

Fini les blagues. Le conservateur Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, qui remplacera José Manuel Barroso à la tête de la Commission européenne le 1er novembre, a présenté mercredi 10 septembre, son « collège » de 26 commissaires. A l’énergie et au climat, c’est l’espagnol Miguel Arias Cañete qui est proposé. Mais son pedigree en fait bondir plus d’un.

4485214_5_5db5_jean-claude-juncker-le-10-septembre-a_c4768f80ce86594805c68d3e19db8d70Dans les instants qui suivent la publication de la composition de l’équipe Juncker, la twittosphère s’agite. En France, l’ex-ministre de l’Écologie et de l’Énergie fait les questions et les réponses.

Un peu plus tôt, le journaliste Idafe Martin Pérez publiait l’extrait d’une déclaration d’intérêt de son compatriote M. Arias Cañete  mettant en évidence ses liens avec l’industrie des hydrocarbures.

De son côté, Enerpresse communiquait la déclaration du futur commissaire laquelle fait également apparaître les intérêts de l’ancien minsitre de l’agriculture, de la pêche et de l’environnement espagnol dans l’industrie des énergie fossiles.

A Bruxelles, la représentation de l’ONG Greenpeace se demande si Monsieur Cañete sera en mesure de passer le grand oral devant confirmer sa position dans le dispositif Junker.

Alors que la Commission Européenne est engagée dans un dialogue fort peu transparent sur un partenariat commercial et de « protection des investissements » avec les États-Unis, l’affaire est à prendre au sérieux et à suivre …

Miguel_Arias_Cañete

Miguel Arias Cañete, voir sa bio en cliquant sur l’image