Articles Tagués ‘Argentine’

(!) Info minute – Revue de Presse
Article d’Olivier Petit Jean publié sur le site de l’observatoire des multinationales

Face au changement climatique – dont elle n’admet encore la réalité qu’avec une certaine réticence [1] -, la firme pétrolière américaine Chevron a déjà trouvé la solution idéale (pour elle) : le gaz de schiste. Et elle n’hésite pas à l’imposer par tous les moyens à sa disposition. En témoignent ses pratiques agressives en Argentine, qui lui valent une nomination aux « prix Pinocchio du climat ».

Aux États-Unis et même parfois en Europe, l’industrie pétrolière vante le gaz de schiste comme une « énergie de transition » permettant à nos économies de se défairemultinationaleorg gaz de schiste argentine chevron de leur dépendance envers les énergies fossiles plus sales, comme le charbon. Or cet argument – volontiers mis en avant par une entreprise comme Chevron lorsqu’elle se trouve interpellée sur sa responsabilité climatique – est largement discrédité. De nombreuses études scientifiques suggèrent que le gaz de schiste pourrait être tout aussi nocif pour le climat que le charbon, en raison des fuites accrues de méthane – un gaz 84 fois plus puissant dans l’atmosphère que le dioxyde de carbone [2].

L’Argentine est le seul pays du monde en dehors de l’Amérique du Nord où Chevron ait pour l’instant réussi à imposer sa vision du défi climatique. En Europe de l’Est, ses velléités de développer le gaz de schiste ont fait long feu. La firme pétrolière a dû abandonner ses concessions en Pologne, Roumanie et Ukraine les unes après les autres au cours des derniers mois du fait de forages décevants. En Argentine, en revanche, Chevron est en première lignée de la ruée des multinationales (comme Total et Shell [3]) sur la province de Neuquén, en Patagonie. Elle a été la première à obtenir une concession avec l’entreprise nationalisée YPF en 2013 et s’est accaparée les gisements les plus prometteurs.

Chantage à l’investissement

En brandissant la promesse d’un investissement de plusieurs milliards de dollars dans le pays. Chevron a aussi réussi à convaincre les autorités argentines de lui accorder des conditions d’exploitation et un régime fiscal extrêmement favorables. La firme a même obtenu la mise en place d’un mécanisme de résolution des litiges État-investisseurs sur mesure, proche de ce qui est souhaité dans le cadre du projet de traité de libre-échange Tafta entre Europe et États-Unis… alors même que l’Argentine est le pays le plus ciblé par les procédures de ce type [4].

Pour couronner le tout, Chevron a aussi menacé de renoncer à tous ses investissements au cas où les procédures intentées en Argentine par les victimes de ses crimes environnementaux en Équateur n’étaient pas rejetées [5]. Au moment où la Cour suprême argentine devait examiner la demande des Équatoriens de gel des avoirs de Chevron dans le pays, le PDG d’YPF et le procureur fédéral ont pesé de tous leur poids en faveur de la firme américaine, en invoquant une menace pour l’emploi et l’investissement.

Quelques jours à peine après que la Cour suprême ait finalement rendu un arrêt favorable à Chevron, son PDG John Watson signait en grande pompe son contrat de concession patagonien avec YPF, en présence de la présidente argentine Cristina Kirchner. Les manifestations qui s’en sont immédiatement suivies en Patagonie ont été violemment réprimées (lire ici). Ce comportement de Chevron en Argentine lui vaut une nomination au « prix Pinocchio du climat » organisé par les Amis de la terre et leurs alliés.

Jeu de dupes pour le climat

Au-delà du cas Chevron, la question du gaz de schiste suscite de nombreuses questions sur la position des États-Unis en matière climatique et sur leur capacité à se dissocier véritablement des intérêts de leur secteur pétrolier. Une enquête du magazine américain Mother Jones avait ainsi révélé comment la diplomatie américaine, sous l’égide d’Hilary Clinton, avait activement soutenu les efforts de Chevron pour faire accepter le gaz de schiste à des populations et des dirigeants réticents en Bulgarie et en Roumanie.

Plus fondamentalement, la mise en lumière du véritable impact climatique du gaz de schiste a de quoi tempérer quelque peu l’optimisme affiché par nombre d’observateurs suite aux annonces récentes de l’administration Obama, qui mettent l’accent sur la sortie du charbon [6]. Si l’on tient compte des fuites de méthane, le simple passage du charbon au gaz (de schiste) risque fort de se révéler un jeu de dupes pour le climat. Pour Chevron et plus largement pour l’industrie pétrolière américaine, en revanche, c’est une source potentielle de profits considérables.

Les votes sont ouverts jusqu’au 2 décembre 2015.

[1] Voir ici et .
[2] Lire ici et , ainsi qu’ici en français.
[3] Lire les enquêtes ici et .
[4] Lire par exemple cette enquête sur la procédure intentée par Suez contre l’Argentine.
[5] Sur l’histoire de la bataille juridique entre Chevron et ses victimes équatoriennes, et le sens de la procédure en Argentine, lire cet article-entretien avec Pablo Fajardo, avocat principal des parties équatoriennes.
[6] La politique énergétique récemment annoncée par le gouvernement britannique repose elle aussi sur la substitution du gaz de schiste (et du nucléaire) au charbon.

(!) Info minute – Revue de Presse

19 10 2013 Saint Claude manifestationDeux mille à deux mille cinq cents personnes ont participé samedi 19 octobre à la manifestation organisée à Saint-Claude (Jura) par les collectifs franc-comtois et rhône-alpins, dans le cadre de la 2e journée internationale contre la fracturation hydraulique et l’extractivisme. Six mois après Nantua (16.03.2013), qui avait réuni 3000 personnes, c’est une nouvelle démonstration de la mobilisation des citoyens de ces deux régions contre les projets pétroliers. De mémoire de Sanclaudien, ce fut samedi la plus grosse manifestation qu’ait connu la cité pipière…

Saint Claude le mirage du gaz de schiste 19 octobre 2013 Thomas Porcher Jacques CambonDans la matinée, la conférence de l’économiste Thomas Porcher a fait salle comble. Plus de 250 personnes sont venues écouter l’auteur du « Mirage du gaz de schiste » démonter un à un les arguments économiques avancés en faveur de l’exploitation des hydrocarbures non-conventionnels.
Saint Claude France Zurawlow Pologne Duplex 19 octobre 2013Deux liaisons par video conférence ont ensuite été établies avec des femmes d’agriculteurs polonais en lutte contre Chevron à Zurawlow. Puis avec une représentante des indiens Mapuche, en Patagonie argentine, opposés aux projets d’exploitation de gaz de schiste de Chevron et Total… Deux entretiens très émouvants, qui rappellent combien les compagnies pétrolières développent leurs activités au mépris des populations locales.

Rassemblement stop gaz de schiste Saint claude 19 octobre 2013Comme à Nantua, l’ambiance de la manifestation fut festive, familiale et bon enfant, malgré la gravité de l’enjeu…
Étaient ainsi réunis:
– des citoyens jurassiens, doubistes, savoyards, isérois, de l’Ain, du Rhône, de Saône-et-Loire, de la Loire, d’Ardèche, de Suisse
des associations engagées dans ce combat contre les forages d’hydrocarbures: Jura nature Environnement, les Amis de la Terre, Humeur Bio, CPIE du Haut-Jura, la FRAPNA, Attac, Greenpeace, No Gazaran…
– des élus, conseillers municipaux, conseillers généraux, conseillers régionaux, parlementaires, des partis politiques, des syndicats
– des grand-parents, des parents, des enfants
– des paysans, des pêcheurs, des apiculteurs, des commerçants, des artistes, des artisans, des spéléologues, des professionnels du tourisme, des enseignants, des élèves, des collégiens, des lycéens et des étudiants, des retraités, des fonctionnaires, des professions libérales, des chômeurs, des ouvriers, des patrons…
Une centaine de bouilles à lait de Bidons sans frontières ouvraient le cortège, une vache le fermait, rappelant que la région a bénéficié de l’une des premières A.O.C. fromagères -le Comté- et qu’elle a aujourd’hui une très forte vocation agricole…

19 10 2013 Saint Claude ouverture de manifestation AOCUne délégation des représentants des collectifs et d’élus -Francis Lahaut (maire de Saint-Claude), Hervé Leroy (maire de Lantenay), Brigitte Monnet (conseillère régionale), Jean-Gabriel Nast (président du Parc naturel régional du Haut-Jura), Raphaël Perrin (conseiller général), Barbara Romagnan (députée du Doubs)- a été reçue par Joël Bourgeot, sous-préfet de Saint-Claude. Elle a fait part de ses inquiétudes quant à l’attribution de nouveaux permis d’exploration (dans le Bas Rhin et en Meurthe-et-Moselle au mois de septembre), quant aux objectifs inavoués des pétroliers qui, depuis la loi Jacob qui leur interdit la fracturation hydraulique, ne cherchent plus que du « pétrole conventionnel ». Les élus ont exprimé leur étonnement quant à Saint Claude manif globalfrackdown soirée slam maison du peuplel’octroi de permis sur des zones karstiques, alors qu’ils sont eux-même soumis à de fortes contraintes de protection des ressources en eau. Il a été demandé le rejet de toutes les demandes de permis de recherche d’hydrocarbures, l’abrogation de tous les permis en vigueur, et la mise en œuvre de la politique de transition énergétique annoncée par le gouvernement.

Cette mobilisation générale fut une réussite. Comme à Nantua, elle a bénéficié d’un important soutien logistique de la ville de Saint-Claude, qui fait partie de ces collectivités qui ont voté une motion contre les forages d’hydrocarbures. Elle s’est achevée tard dans la nuit après une belle soirée Slam « Ya d’leau dans l’gaz » à la Maison du Peuple de Saint-Claude.

Il y aura d’autres rendez-vous: la lutte continue!

J.V.

  • Revue de presse

Compte-rendus de la manifestation de Saint-Claude
France 3 Franche-Comté: Lire le reportage
Regarder le 19/20 du 19.10.2013: cliquer ici

Le Progrès: Brève Internet ici (avec les commentaires des Internautes qui valent leur pesant de cacahuètes) et compte-rendu en pièce jointe.
Les Echos du Jura: reportages et photos ici
Reporterre : un article complet ici publié ce jour
Radio Plein Air: une brève par là

La dépêche AFP sur Global Frackdown 2, citant la manifestation de Saint-Claude, a été reprise par de nombreux médias (il n’est pas nécessaire de cliquer sur tous les liens: c’est le même texte):
La Croix, Libération, Le Nouvel Observateur, maville.com, L’Express, Boursorama, Nice Matin, La Nouvelle République, Mediapart, Le Télégramme

D’autres médias ont fait un zoom sur la manifestation de Montélimar uniquement:
France Info (« Gaz de schiste: des milliers d’opposants mobilisés »), Le Figaro, Midi Libre (« Nos pâturages valent mieux que vos forages »), Le Télégramme
Vidéo de l’AFP: à regarder .

Pour ceux qui ont manqué les annonces:
La Voix du Jura: version en ligne
Le Monde: « La contestation contre le gaz de schiste essaime dans le monde »
Médiapart – Le blog de Maxime Combes

A voir: le débat sur La Chaîne Parlementaire
Gaz de schiste : la bataille est-elle vraiment gagnée ?
Avec:

  • Christian Bataille, Député PS du Nord, vice-président de l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques
  • Michèle Rivasi, Députée européenne EELV
  • Philippe Chalmin, Économiste, Spécialiste du marché des matières premières, auteur de Crises 1929, 1974, 2008 Histoire et espérances, éditions Bourin, 2013
  • Thomas Porcher, Professeur en Marchés des matières premières à l’ESG, management School, auteur de Le mirage du gaz de schiste, mai 2013