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Selon le journal britannique le Mirror, le juge critiqué pour avoir infligé des peines de prison aux trois manifestants contre la fracturation hydraulique (lire ici) a « des liens familiaux avec l’industrie pétrolière et gazière« .

En plus d’une décision scandaleuse, un conflit d’intérêt?

C’est le juge Robert Altham qui a prononcé la peine d’emprisonnement à l’encontre de Simon Blevins, 26 ans, Richard Roberts, 36 ans, et Richard Loizou, 31 ans, pour leur manifestation sur un site de Cuadrilla.

Connus sous le nom des «Fracking Three», ils sont les premiers militants écologistes à être emprisonnés « pour nuisance publique » depuis 1932, « un châtiment manifestement excessif ».

Dans son édition du 10 octobre 2018, le Daily Mirror révèle que l’entreprise familiale Altham est un fournisseur de l’industrie pétrolière et gazière de la mer d’Irlande.

Le Mirror poursuit en indiquant que J.C. Altham and Sons fait partie de la chaîne d’approvisionnement du géant de l’énergie Centrica, qui a investi des dizaines de millions de livres sterling dans la fracturation hydraulique nécessaire à l’exploration et l’exploitation des gaz et huile de schiste.

La sœur du juge Altham, Jane Watson, a écrit une lettre ouverte en faveur de la fracturation hydraulique, qui disait: «Il est temps de donner une chance au schiste» et affirme que cela créerait des emplois.

Au Royaume-Uni, le code de conduite des juges stipule que l’impartialité du juge peut être mise en doute si des membres de sa famille sont «politiquement actifs» ou ont un «intérêt financier» en relation avec l’affaire.

Le juge Altham, juge de la cour suprême de Preston, lors de l’énoncé de la sentence avait déclaré: «Seule une détention immédiate peut entraîner une peine suffisante

Selon le Mirror, les parents du juge, John et Linda, 86 et 84 ans, sont administrateurs de J.C. Altham & Sons.

Sa sœur Jane, 54 ans, est directrice générale de la société laquelle approvisionne les navires, notamment en nourriture, en outils, en matériel de gréage et en vêtements. Le site Internet de la société indique qu’il s’agit d’un «fournisseur spécialisé dans les plateformes pétrolières et gazières en mer».

Trois plates-formes pétrolières situées dans la mer d’Irlande orientale – près de la base d’Altham à Heysham, dans le comté de Lancs – appartiennent au propriétaire britannique de gaz, Centrica, qui a investi des dizaines de millions de livres dans l’entreprise de fracturation Cuadrilla . Cuadrilla est la société qui dispose d’un permis de forage dans le comté de Lancashire contre lequel manifestait la population locale et les trois militants emprisonnés.

En 2015, le nom de la sœur du juge et celui de son entreprise figurait sur une lettre ouverte de 119 entreprises

Cette lettre exhortait le conseil du comté de Lancashire à autoriser la fracturation hydraulique et à créer une «chaîne d’approvisionnement de 33 milliards de £ (38 Milliards d’Euros)».
La campagne était dirigée par le North West Energy Task Force (NWETF), qui aurait reçu un soutien financier de Cuadrilla et de Centrica. La NWETF s’est ensuite faite connaître en tant que groupe de pression Lancashire For Shale 
(LFS, Lancashire pour le schiste).

LFS a loué la décision du juge Altham en déclarant que «la justice avait été bien servie».

Les avocats des manifestants tentent de faire annuler leurs peines.  Sharron, 62 ans, la mère de Loizou, a confié au Mirror: « J’ai été complètement choquée lorsqu’il a été emprisonné, sa peine est incroyablement sévère. Nous nous attendions à des travaux d’intérêts généraux ou à une peine avec sursis. C’est assez effrayant de voir que dans ce pays, vous pouvez être emprisonné pour une manifestation pacifique. »

Les trois militants écologistes qui sont les premiers à avoir été condamnés à une peine de prison pour une manifestation anti-fracturation hydraulique au Royaume-Uni doivent faire appel de leurs condamnations alors que la colère grandissante suscitée par leurs punitions «excessives et extraordinaires» se fait sentir.

La semaine dernière, Simon Roscoe Blevins, 26 ans, et Richard Roberts, 36 ans, ont été condamnés à 16 mois d’emprisonnement et Richard Loizou, 31 ans, a été condamné 15 mois après avoir été reconnu coupable d’avoir causé une nuisance publique par un jury devant la cour suprême de Preston.

Les quatre hommes ont été inculpés après avoir participé à une manifestation de quatre jours qui empêchait un convoi de camions transportant du matériel de forage d’entrer sur le site de fracturation de Preston New Road près de Blackpool en juillet de l’année dernière.

Kirsty Brimelow QC, responsable de l’équipe internationale des droits de l’homme à Doughty St Chambers, qui dirige l’appel sur une base bénévole, a déclaré: «Nous demandons à la cour d’appel d’expédier l’appel. Nous sommes chanceux dans ce pays d’avoir cette option. Le principal argument dans cette affaire a été présenté à la cour de la couronne de Preston: c’est une erreur d’enfermer des manifestants pacifiques. »

Samedi (6 octobre 2018), les amis, la famille et les soutiens des trois hommes organiseront une manifestation de solidarité devant le centre pénitentiaire de Preston où sont actuellement enfermés les trois militants. Planton Loizou, ancien voyagiste et père de Richard Loizou, participera à ce qui sera sa première manifestation politique depuis plus de 40 ans.
« Cela ne sert à rien de les mettre en prison, car cela a permis de faire de moi, de sa mère et du reste de la famille, des activistes« , a-t-il déclaré. «J’ai été un conservateur de bout en bout pendant les 32 premières années de ma vie électorale. Ma femme ne l’était pas et je ne l’écoutais pas et c’était une erreur.

Rosalind Blevins, ancienne chercheuse scientifique et mère de Simon Roscoe Blevins, a déclaré qu’elle s’attendait à ce que son fils reçoive une amende ou des travaux d’intérêt général, pas une longue peine de prison. « Il n’a fait de mal à personne, n’a agressé personne, n’a intimidé personne, ni même n’a insulté personne verbalement, ni rien endommagé« , a-t-elle déclaré. « Je suis fier de lui pour avoir osé défendre ce en quoi il croit. Je sais qu’il est fondamentalement bon. »

Preston New Road est au centre des manifestations depuis octobre 2016, lorsque le gouvernement a annulé une décision du conseil du comté du Lancashire et donné son accord à l’entreprise énergétique Cuadrilla pour extraire du gaz de schiste dans deux puits du site.

Plus de 300 manifestants ont été arrêtés dans cette ville depuis que Cuadrilla a commencé à construire une plate-forme de fracturation en janvier 2017. La société pétro-gazière a annoncé vendredi que la fracturation hydraulique commencerait la semaine prochaine, mais la Haute Cour a émis une injonction interdisant le début des travaux jusqu’à une audience qui se tiendra mercredi (10 octobre 2018) .

Source: The Guardian

Pour continuer à apporter votre soutien aux prisonniers voir ici

Edit 12 octobre 2018: L’appel sera examiné par la cour d’appel de Londres le 17 octobre 2018

 

 

Communiqué de presse du 30 septembre 2018

des collectifs contre les gaz et huiles de schiste et de couche

Des militants britanniques condamnés à de la prison ferme

Quatre militants environnementaux britanniques poursuivis pour avoir participé en 2017 à la manifestation non violente qui a bloqué les camions transportant les équipements de forage pour le site de Preston New Road, près de Blackpool dans le Lancashire, viennent d’être condamnés et trois emprisonnés.

Mercredi 26 septembre, Simon Roscoe Blevins, 26 ans, et Richard Roberts, 36 ans, ont été condamnés à 16 mois de prison ferme et Richard Loizou, 31 ans, à 15 mois pour “nuisance publique”. Un autre militant, Julian Brock, 47 ans, a été condamné à 12 mois avec sursis après avoir plaidé coupable.

Le site de Preston New Road a été le lieu principal des protestations depuis que le gouvernement britannique a annulé une décision du conseil du comté de Lancashire et a donné à la société pétrogazière Cuadrilla l’autorisation de fracturer deux puits d’exploration de gaz de schiste.

La société a confirmé l’installation de tout le matériel permettant le début des travaux de fracturation dans les prochaines semaines.

Les trois légitimes militants anti-fracking sont les premiers activistes environnementaux à être emprisonnés pour une manifestation, qui plus est non violente, au Royaume-Uni depuis 1932.

Les collectifs français contre les pétrole et gaz de schiste et de couche soutiennent depuis plusieurs années la lutte des militants britanniques contre le fracking. Ils apportent aujourd’hui leur soutien aux militants emprisonnés et demandent aux autorités britanniques leur libération immédiate.

« No gazaran, ni ici ni ailleurs, ni aujourd’hui ni demain »


Le Collectif Stop aux gaz et huiles de schiste 07
Les Collectifs Rhône Alpes contre les gaz et huiles de schiste
Les collectifs Stop GHRM38
Collectif Touche pas à mon schiste
Collectif Causse Méjean – Gaz de Schiste NON ! (48)
Collectif Florac, Stop Gaz de Schiste (48)
Collectif viganais contre les gaz et huile de schiste, de houille et de couche (30)
Collectif Camis’gaz 30
Basta!Gaz Alès 30
Collectif Gaz de schiste Non merci ! Garrigue Vaunage 30
Collectif citoyen de Pézenas, Castelnau de Guers 34
Collectif du Céressou 34
Collectif de Campagnan, St Pargoire 34
Collectif Arcois pour la Planète, les Arcs sur Argens 83

Source : The Guardian

–> 27/09/2018: Vous voulez exprimer votre solidarité avec les prisonniers voir ici comment procéder

Une première depuis 1932 au Royaume-Uni, trois militants environnementaux sous les verrous suite à une manifestation contre l’exploitation d’hydrocarbures par fracturation hydraulique !

Trois militants anti-fracking sont les premiers militants environnementaux à être emprisonnés pour une manifestation au Royaume-Uni depuis 1932.

Simon Roscoe Blevins, âgé de 26 ans, et Richard Roberts, âgé de 36 ans, ont été condamnés à 16 mois de prison et à Richard Loizou, âgé de 31 ans, mercredi après avoir été reconnu coupable de nuisance publique par un jury du tribunal de Preston en août. Un autre accusé, Julian Brock, âgé de 47 ans, a été condamné à 12 mois de prison avec sursis après avoir plaidé coupable à la même infraction.

Les quatre hommes ont été inculpés après avoir participé à une manifestation de protestation directe de quatre jours qui a empêché un convoi de camions transportant du matériel de forage d’entrer sur le site de fracturation de Preston New Road, près de Blackpool.

Il s’agirait donc des premiers militants écologistes à recevoir des peines de prison pour une manifestation au Royaume-Uni depuis l’intrusion de masse de Kinder Scout dans le Peak District en 1932.

Le mardi 25 juillet 2017 vers 8h, alors que sept camions contenant du matériel de forage tentaient de s’approcher du site, Roberts, restaurateur de pianos londoniens, franchit un cordon de police et grimpe sur le premier camion. Loizou, un enseignant de Devon, monte dans la cabine du dernier camion.

Vers 15h18, Blevins, un pédologue de Sheffield, également grimpe également sur l’un des camions. Aux premières heures du lendemain matin, Brock, de Torquay, grimpe aussi sur un camion du convoi.

Des manifestants jettent des couvertures, de la nourriture et de l’eau aux hommes alors qu’ils campaent sur les véhicules. Loizou redescend le 27 juillet à 5h10 après 45 heures. Blevins fait de même à 16h45 le 28 juillet après avoir passé un peu plus de 73 heures sur son camion. Roberts descend à 20h13 le même jour, après 84 heures. Brock ne redescendra pas de son camion avant le 29 juillet à 11h35, après environ 76 heures.

Le site près de Preston New Road a été le point focal des protestations depuis que le gouvernement a annulé une décision du conseil du comté de Lancashire et a donné son accord à la société d’énergie Cuadrilla pour l’extraction de gaz de schiste dans deux puits sur le site en octobre 2016. arrêté depuis que Cuadrilla a commencé à construire une plateforme de fracturation sur le site en janvier 2017.

La société a déclaré que la fracturation devrait commencer dans les prochaines semaines, confirmant lundi que 28 camions avaient apporté du matériel de fracturation sur le site.

Condamnant les hommes, le juge Robert Altham a déclaré qu’il pensait que les trois hommes risquaient de récidiver et qu’ils ne pouvaiten pas être réhabilités car «chacun reste motivé par une confiance sans faille dans sa droiture». Il a déclaré que les prévenus étaient motivés par un souci sérieux de l’environnement, mais qu’ils considéraient le public comme «des dommages collatéraux nécessaires et justifiés».

Les membres de la famille des hommes assis dans la galerie publique ont fondu en larmes lorsque les verdicts ont été lus. Ils ont chanté une chanson et les ont embrassés quand ils ont été reconduits hors du tribunal.

Parlant au nom de l’accusation, Craig MacGregor a déclaré que la police avait fait valoir que la manifestation avait entraîné une perturbation importante des déplacements, ce qui avait entraîné la fermeture de la route jusqu’à ce qu’une contrournement soit établi. La police a déclaré que la vie des habitants avait été perturbée et que l’activité commerciale des entreprises locales avait été impactée. MacGregor a déclaré que les chauffeurs de camion ont été invités à rester sur place et qu’ils n’ont pas pu rentrer chez eux. Il a déclaré que la protestation avait coûté 12 000 livres sterling à la police et environ 50 000 livres sterling à Cuadrilla.

Revue de presse c’est ici avant le 01/06/2018 c’est là

Jeudi 30 août 2018 – Alors que le ministre de l’Écologie Nicolas Hulot vient de démissionner avec fracas en invoquant le pouvoir excessif des lobbies, les Amis de la Terre France et l’Observatoire des multinationales révèlent aujourd’hui des documents inédits sur le lobbying auprès du Conseil d’État, qui avait conduit à vider de sa substance la loi « Hulot » sur la fin de l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures en France. Cette loi est aujourd’hui brandie par le gouvernement comme son principal succès en matière écologique, alors que sa portée avait été réduite à une peau de chagrin. Ces documents ont été obtenus dans le cadre d’une enquête publiée en juin dernier par les Amis de la Terre et l’Observatoire des multinationales « Les Sages sous influence ? Le lobbying auprès du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État » (1).

En juin dernier, les Amis de la Terre France et l’Observatoire des multinationales levaient le voile sur les mécanismes d’influence très mal connus mais très efficaces qui s’exercent en France sur le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État, conduisant à la censure de nombreuses mesures fiscales ou environnementales, au nom de la protection des « droits et libertés économiques ».

Notre rapport s’attardait en particulier sur les coulisses de la loi Hulot sur la fin des hydrocarbures, laquelle avait été vidée de sa substance suite à un avis du Conseil d’État (2). Nous avions alors officiellement demandé à cette instance, au nom de la transparence, qu’elle nous communique les « contributions extérieures » reçues de la part de lobbyistes. Le Conseil d’État a pour la première fois accepté de communiquer certains de ces documents, au nom du droit d’accès à l’information environnementale : il s’agit de contributions du MEDEF, de l’Union française des industries pétrolières (UFIP, lobby du secteur des hydrocarbures), et d’un cabinet d’avocats d’affaires agissant au nom de la société canadienne Vermilion. Il refuse cependant de nous transmettre deux autres « contributions extérieures » au prétexte qu’elles ne présentaient que des « arguments purement juridiques » (3).

Juliette Renaud, chargée de campagne senior sur la Régulation des multinationales aux Amis de la Terre commente « L’obtention de tels documents auprès du Conseil d’État est une grande première, et confirme le poids excessif des lobbies jusqu’au sommet de l’État. Mais ce n’est qu’un premier pas qui doit être confirmé par des mesures systématiques de transparence sur les influences qui pèsent actuellement sur l’élaboration des avis de cette instance. Et il doit en être de même au niveau des décisions du Conseil constitutionnel. »

Ces documents, que nous analysons de façon détaillée dans l’article ci-joint (4), confirment largement ce que nous avancions dans notre rapport, le Conseil d’État reprenant dans son avis plusieurs arguments des lobbies, notamment sur le besoin d’une étude d’impact plus approfondie, sur l’importance et excellence du secteur pétrolier français. Mais cet avis est surtout consacré à la question de la prolongation des concessions pétrolières, qui devenait interdite dans la toute première version du projet de loi.

Les trois contributions des lobbies se plaignent en effet du fait que le texte « interrompt brutalement des activités de production pour des concessions à renouveler avant 2040 », « violant leurs espérances légitimes de se voir octroyer des prolongations ». La société canadienne Vermilion, par la voix de son cabinet d’avocats, va plus loin et n’hésite pas à évoquer la possibilité pour les détenteurs de concession de recourir à l’arbitrage international pour protéger leurs intérêts. Dans son avis, le Conseil d’État reprend les mêmes mots, se référant lui aussi à leurs « espérances légitimes », et au fait que la non prolongation des concessions constituerait un risque d’atteinte « à la garantie des droits des opérations et au droit de propriété  ».

Suivant à la lettre l’avis du Conseil d’État, le gouvernement a alors immédiatement supprimé cette disposition du projet de loi. Il s’agissait pourtant d’une mesure phare de la première mouture du texte, qui aurait permis d’organiser une réel arrêt progressif de la production d’hydrocarbures en France. Ensuite, par voie d’amendement, le gouvernement a ouvert la porte à un renouvellement des concessions même au-delà de la date prétendument butoir de 2040.

Le MEDEF demandait également le maintien de l’autorisation d’exploration et exploitation des gaz de couche, qui est pourtant un hydrocarbure non conventionnel. Il obtiendra gain de cause via un amendement gouvernemental, malgré les nombreuses alertes des Amis de la Terre et de leurs partenaires.

Notes :

(1) Le rapport est disponible en ligne : www.amisdelaterre.org/sages-sous-influence

(2) Voir le décryptage publié par les Amis de la Terre et leurs partenaires après le passage au Conseil d’Etat : http://www.amisdelaterre.org/Mettre-fin-aux-energies-fossiles-Decryptage-de-la-loi-Hulot.html

et leur communiqué de presse de réaction lors de l’adoption finale de la loi : http://www.amisdelaterre.org/Loi-Hulot-trop-d-exemptions-et-pas-assez-d-ambition-pour-etre-une-loi.html

(3) La lettre de réponse du Conseil d’Etat et les contributions des lobbies sont disponibles ici : http://www.amisdelaterre.org/IMG/pdf/loi_hulot_contributions_lobbies_au_conseil_etat.pdf

(4) Article disponible également en ligne ici : http://www.amisdelaterre.org/Decryptage-comment-les-lobbies-ont-detricote-la-loi-Hulot-via-le-Conseil-d-Etat.html

Revue de presse c’est ici avant le 01/06/2018 c’est là

La Française de l’Energie titulaire du permis exclusif de recherche d’hydrocarbures (PERH) liquides ou gazeux de Lons le Saunier  avait introduit une demande de prolongation de son permis.

L’administration s’est prononcée et a rejeté cette demande de prolongation. Ce permis qui visait la recherche de gaz de couche n’est plus.

Le 1er décembre 2017 – L’Assemblée nationale vient d’adopter en nouvelle lecture le projet de loi Hulot visant à « mettre fin à l’exploration et l’exploitation d’hydrocarbures ». Depuis plusieurs mois, des ONG et collectifs citoyens ont souligné le caractère approprié et ambitieux des objectifs de ce projet de loi, mais aussi ses failles ne permettant pas de les atteindre. Malheureusement les opportunités de renforcer le texte ont toutes été manquées. En première lecture, de trop nombreuses exemptions avaient été introduites par le gouvernement, et elles ont été confirmées aujourd’hui : possibilité d’octroyer des concessions dépassant la date de 2040 sur critères purement économiques, absence d’interdiction des gaz de couche, qui sont pourtant des hydrocarbures non conventionnels, et dérogation pour Lacq malgré le scandale sanitaire.

Une loi de vidée de son sens
Vidée de son sens par le Sénat, la loi Hulot sur les hydrocarbures revenait en discussion en séance plénière de l’Assemblée nationale ce vendredi 1er décembre. Alors qu’ils avaient une nouvelle occasion de renforcer le texte, le gouvernement et la majorité se sont contentés, le plus souvent, de revenir au texte voté en première lecture, faiblesses et exemptions comprises.

Pour Isabelle Levy, du collectif du Pays Fertois “Non au pétrole de schiste” (77) : “Il a été beaucoup question d’équilibre tout au long de cette nouvelle lecture. Et pourtant le déséquilibre est clairement en faveur des droits acquis des industriels, présentés abusivement comme non négociables, alors que l’urgence climatique et sanitaire, qui nécessite pourtant des mesures bien plus courageuses et visionnaires, semble pouvoir, elle, être négociée !
Les contradictions du gouvernement entérinée par les députés
Le débat de ce matin a néanmoins permis de mettre en lumière les contradictions qui viennent mettre à mal la communication du gouvernement sur le caractère “exemplaire” et “historique” de cette loi sur les hydrocarbures. Ainsi, Nicolas Hulot a bien dû reconnaître que la date de 2040 n’était pas “une cloison étanche”, alors que cette date était pourtant érigée comme une limite infranchissable pour la fin de toute exploration et exploitation lors de la présentation du projet de loi.

Par ailleurs, le ministre a reconnu que le gouvernement n’a jamais souhaité interdire l’exploration et l’exploitation de l’ensemble des hydrocarbures non conventionnels comme il l’a pourtant revendiqué à plusieurs reprises. En effet, selon la définition des techniques non conventionnelles interdites par l’article 3, l’exploration et l’exploitation des gaz de couche restent autorisées, alors que l’ensemble de la communauté scientifique reconnaît leur caractère “non conventionnel”. La définition présente désormais dans l’article 3 de la loi Hulot se contente donc en réalité d’interdire la fracturation hydraulique… en en proposant enfin une définition.

Pour Juliette Renaud, des Amis de la Terre France : “Nous avons multiplié les interpellations à ce sujet (1), et depuis plus d’un mois le gouvernement se cache derrière des arguments techniques, alors qu’il s’agissait bien d’un choix politique : celui de céder aux pressions de la Française de l’Energie, qui détient des permis d’exploration de gaz de couche en Lorraine, de peur d’avoir à lui payer des compensations financières. Mais que sont ces éventuelles compensations au regard des impacts irréversibles de ces forages (2) ? Le gouvernement aurait-il ainsi protégé les industriels si la mobilisation avait été aussi forte en Lorraine qu’en Ardèche en 2011 au moment de la bataille des gaz de schiste ?

Les Lorrains valent-ils moins de les Ardéchois?
C’est à se demander si les Lorrains valent moins que les Ardéchois ou, pour le dire autrement, si la protection de la santé et de l’environnement est fonction de la capacité de mobilisation des populations locales. Une question également valable pour le bassin de Lacq qui avait été exempté de l’interdiction d’exploitation par le gouvernement lors de la première lecture. Des études, longtemps gardées secrètes ainsi que des articles de presse attestent désormais de la gravité du scandale sanitaire en cours, sur place.

Selon Maxime Combes, d’ATTAC France : “Nicolas Hulot a refusé de remettre en cause l’exemption accordée à Lacq au motif qu’il ne disposerait pas de “faits scientifiquement établis” : mourir plus jeune et vivre en plus mauvaise santé que la moyenne des Français sont pourtant des faits incontestables ! La présence de rejets dangereux pour la santé à proximité des sites industriels, établie et connue de tous, constitue un faisceau d’éléments sérieux suffisants qui devrait conduire le gouvernement à mettre en œuvre urgemment un processus de reconversion industrielle sur le territoire concerné plutôt que prolonger les autorisations d’exploitation au-delà de 2040.

A peine 15 jours après la nouvelle alerte des 15 000 scientifiques attestant de l’urgence d’agir, nos organisations déplorent la frilosité et le manque de détermination du gouvernement et de la majorité présidentielle. Quand on écarte des amendements modestes visant à réglementer les importations d’hydrocarbures les plus polluants, comme les sables bitumineux, ou à ne plus autoriser l’État à apporter son concours direct aux activités des pétroliers à l’exportation, au motif qu’ils sont prématurés, comme l’a fait Nicolas Hulot, le slogan #MakeThePlanetGreatAgain a bien été supplanté par le #BusinessAsUsual.

A quelques jours du sommet “One Planet Summit”, le message envoyé au reste du monde est celui d’un gouvernement passé maître dans l’art du hashtag … et des promesses inabouties. Cette riche et noble ambition qui consiste à “laisser les énergies fossiles dans le sol” mérite définitivement mieux. Nous donnons rendez-vous le 12 décembre pour une grande mobilisation citoyenne, en marge du sommet organisé par Emmanuel Macron, intitulée “Pas un euro de plus pour les énergies du passé” (3).

(1) Voir notre analyse du texte adopté en première lecture et nos deux lettres ouvertes aux députés cette semaine : Communiqué du 4 octobre 2017 : http://www.amisdelaterre.org/Loi-Hulot-sous-l-impulsion-du-gouvernement-l-Assemblee-nationale-vote-une-loi.html Lettre du 28 novembre 2017 : http://www.amisdelaterre.org/Loi-Hulot-quel-sort-pour-les-gaz-de-schiste-et-de-couche.html Lettre du 30 novembre 2017 http://www.amisdelaterre.org/Gaz-de-couche-gaz-de-schiste-les-Lorrains-valent-ils-moins-que-les-Ardechois.html

(2) Les gaz de couche sont les seuls hydrocarbures non conventionnels qui font actuellement l’objet de forages exploratoires, en Lorraine. Leur extraction présente pourtant des risques tout aussi voir plus importants que celle des gaz et huiles de schiste, tant en termes de contamination des nappes phréatiques (qui sont plus proches des veines de charbon que de la roche-mère emprisonnant le gaz ou le pétrole de schiste), et de fuites de méthane (car le charbon est plus friable). Ces risques pour l’environnement ne sont pas hypothétiques. Partout où sont actuellement exploités les gaz de couche, aux États-Unis ou en Australie, des pollutions d’envergure ont été constatées, avec des conséquences graves pour les populations locales et les territoires.

Le 4 octobre 2017 – L’Assemblée nationale vient d’examiner en première lecture le projet de loi Hulot “mettant fin à l’exploration et l’exploitation d’hydrocarbures”. Alors que le passage en commission Développement durable avait permis de renforcer le texte sur certains points (notamment l’interdiction des techniques non conventionnelles, et l’arrêt de toutes les concessions en 2040), le vote en plénière signe aujourd’hui un net recul. En effet, deux amendements très problématiques du gouvernement ont été adoptés, et ce dernier a bloqué systématiquement les modestes propositions qui voulaient donner au texte un contenu en accord avec ses objectifs et ambitions.

Alors qu’elle devait permettre de mettre en œuvre l’Accord de Paris et de tourner la page des énergies fossiles, la loi Hulot est en net retrait par rapport aux discours et aux engagements réitérés du Président de la République, du gouvernement et du ministre de la Transition écologique et solidaire. Le texte voté aujourd’hui est le résultat de renonciations et reculs successifs de Nicolas Hulot, depuis la présentation d’une première version au CNTE fin août (1), jusqu’à la discussion en plénière.

Selon Nicolas Haeringer, de 350.org, « Au nom d’une conception datée de la “liberté d’entreprendre”, inadaptée au défi que représente le réchauffement climatique, les députés ont manqué une opportunité rare de voter un texte qui aurait dû servir d’exemple au reste de la communauté internationale ».

Face aux failles initiales du texte, nos organisations avaient fait des propositions concrètes d’amélioration, soutenues par la mobilisation en ligne de plusieurs milliers de citoyens (2). La discussion en commission du Développement durable la semaine dernière avait pu faire croire un instant que quelques avancées étaient possibles (3). Elles ont été malheureusement balayées au cours des trois séances de discussions en assemblée plénière. En plus de concéder aux lobbies industriels une dérogation discutable pour le bassin de Lacq – l’exploitation génère de fortes pollutions aux impacts sanitaires majeurs -, le gouvernement a déposé un amendement qui ouvre une nouvelle faille dans la loi : la possibilité, pour les premières concessions délivrées en vertu du droit de suite, d’être octroyées pour une échéance excédant 2040 dans le cas où les industriels démontreraient qu’ils ne peuvent pas rentrer dans leurs frais.

Selon Juliette Renaud, des Amis de la Terre France : « Cet amendement est le symbole de la frilosité du gouvernement : il n’ose pas toucher au code minier, qui pourtant réduit sa capacité d’action à presque néant. De même, le gouvernement a de nouveau bloqué les amendements qui voulaient supprimer ou simplement restreindre le droit de suite. Face à l’urgence climatique, le ministre disait vouloir lancer un signal aux industriels, pour sortir des énergies fossiles, mais ce texte envoie le signal inverse : entre les intérêts économiques et le climat, ce sont toujours les intérêts économiques qui priment et ce, jusqu’à 2040 voire au-delà !  ».

Pour Isabelle Levy, du collectif du pays Fertois “Non au pétrole de schiste”, « Le projet ambitieux de Nicolas Hulot se limite à afficher un panneau « fermé » sur la porte du bureau où sont habituellement déposées les demandes de permis de recherche. Pour le reste c’est business as usual : les permis actuels seront prolongés, et pourront donner lieu à de nouvelles concessions qui pourront même aller au-delà de 2040 ! ».

L’autre recul notable concerne les hydrocarbures non conventionnels. En commission du Développement durable, un amendement avait été voté permettant de renforcer la loi Jacob de 2011 : il interdisait, au-delà de la fracturation hydraulique, la stimulation et les autres techniques non conventionnelles. Mais le gouvernement a proposé en dernière minute un amendement qui, sous motif de précision technique, vide en réalité de tout son sens la définition des techniques interdites. En dehors de l’abrogation des articles 2 et 4 de la loi Jacob concernant l’expérimentation, la loi Hulot n’apporte donc aucune amélioration en la matière.

Maxime Combes, d’ATTAC France conclut : « Aux objectifs ambitieux et appropriés initialement annoncés par le gouvernement, correspond une loi en demi-teinte bien éloignée de l’exemplarité totale attendue. En multipliant les dérogations et en refusant de s’engager sur la réductions des importations d’hydrocarbures (99% de notre consommation), le gouvernement a préféré sécuriser les droits des détenteurs des permis plutôt que commencer à résoudre le défi de ce début de 21ème siècle : faire en sorte que le droit des affaires, notamment le droit minier, la liberté d’entreprendre et le commerce international, soient enfin soumis à l’impératif climatique. C’est la tâche que nous poursuivrons dans les mois à venir : #MakethePlanetGreatAgain ou #BusinessAsUsual, il va bien falloir choisir ».

Le projet de loi devrait être examiné par le Sénat au moins de novembre, le gouvernement espérant une adoption finale par le Parlement avant la fin de l’année.

Notes :
(1) Voir notre note de décryptage sur les reculs entre le texte présenté au CNTE le 23 août, et celui examiné au Conseil des ministres et transmis à l’Assemblée nationale le 6 septembre.
(2) Voir notre campagne d’interpellation des députés “Loi Hulot : redonnons à l’État le pouvoir de dire non !”, lancée le 21 septembre : https://350.org/fr/pasdepermis/
(3) Voir notre communiqué du 27 septembre 2017, suite au passage en commission du Développement durable : http://www.amisdelaterre.org/Loi-Hulot-les-ameliorations-doivent-etre-confirmees-et-les-dernieres-failles.html