Articles Tagués ‘Lobbying’

Revue de presse c’est ici avant le 01/06/2018 c’est là

Jeudi 30 août 2018 – Alors que le ministre de l’Écologie Nicolas Hulot vient de démissionner avec fracas en invoquant le pouvoir excessif des lobbies, les Amis de la Terre France et l’Observatoire des multinationales révèlent aujourd’hui des documents inédits sur le lobbying auprès du Conseil d’État, qui avait conduit à vider de sa substance la loi « Hulot » sur la fin de l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures en France. Cette loi est aujourd’hui brandie par le gouvernement comme son principal succès en matière écologique, alors que sa portée avait été réduite à une peau de chagrin. Ces documents ont été obtenus dans le cadre d’une enquête publiée en juin dernier par les Amis de la Terre et l’Observatoire des multinationales « Les Sages sous influence ? Le lobbying auprès du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État » (1).

En juin dernier, les Amis de la Terre France et l’Observatoire des multinationales levaient le voile sur les mécanismes d’influence très mal connus mais très efficaces qui s’exercent en France sur le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État, conduisant à la censure de nombreuses mesures fiscales ou environnementales, au nom de la protection des « droits et libertés économiques ».

Notre rapport s’attardait en particulier sur les coulisses de la loi Hulot sur la fin des hydrocarbures, laquelle avait été vidée de sa substance suite à un avis du Conseil d’État (2). Nous avions alors officiellement demandé à cette instance, au nom de la transparence, qu’elle nous communique les « contributions extérieures » reçues de la part de lobbyistes. Le Conseil d’État a pour la première fois accepté de communiquer certains de ces documents, au nom du droit d’accès à l’information environnementale : il s’agit de contributions du MEDEF, de l’Union française des industries pétrolières (UFIP, lobby du secteur des hydrocarbures), et d’un cabinet d’avocats d’affaires agissant au nom de la société canadienne Vermilion. Il refuse cependant de nous transmettre deux autres « contributions extérieures » au prétexte qu’elles ne présentaient que des « arguments purement juridiques » (3).

Juliette Renaud, chargée de campagne senior sur la Régulation des multinationales aux Amis de la Terre commente « L’obtention de tels documents auprès du Conseil d’État est une grande première, et confirme le poids excessif des lobbies jusqu’au sommet de l’État. Mais ce n’est qu’un premier pas qui doit être confirmé par des mesures systématiques de transparence sur les influences qui pèsent actuellement sur l’élaboration des avis de cette instance. Et il doit en être de même au niveau des décisions du Conseil constitutionnel. »

Ces documents, que nous analysons de façon détaillée dans l’article ci-joint (4), confirment largement ce que nous avancions dans notre rapport, le Conseil d’État reprenant dans son avis plusieurs arguments des lobbies, notamment sur le besoin d’une étude d’impact plus approfondie, sur l’importance et excellence du secteur pétrolier français. Mais cet avis est surtout consacré à la question de la prolongation des concessions pétrolières, qui devenait interdite dans la toute première version du projet de loi.

Les trois contributions des lobbies se plaignent en effet du fait que le texte « interrompt brutalement des activités de production pour des concessions à renouveler avant 2040 », « violant leurs espérances légitimes de se voir octroyer des prolongations ». La société canadienne Vermilion, par la voix de son cabinet d’avocats, va plus loin et n’hésite pas à évoquer la possibilité pour les détenteurs de concession de recourir à l’arbitrage international pour protéger leurs intérêts. Dans son avis, le Conseil d’État reprend les mêmes mots, se référant lui aussi à leurs « espérances légitimes », et au fait que la non prolongation des concessions constituerait un risque d’atteinte « à la garantie des droits des opérations et au droit de propriété  ».

Suivant à la lettre l’avis du Conseil d’État, le gouvernement a alors immédiatement supprimé cette disposition du projet de loi. Il s’agissait pourtant d’une mesure phare de la première mouture du texte, qui aurait permis d’organiser une réel arrêt progressif de la production d’hydrocarbures en France. Ensuite, par voie d’amendement, le gouvernement a ouvert la porte à un renouvellement des concessions même au-delà de la date prétendument butoir de 2040.

Le MEDEF demandait également le maintien de l’autorisation d’exploration et exploitation des gaz de couche, qui est pourtant un hydrocarbure non conventionnel. Il obtiendra gain de cause via un amendement gouvernemental, malgré les nombreuses alertes des Amis de la Terre et de leurs partenaires.

Notes :

(1) Le rapport est disponible en ligne : www.amisdelaterre.org/sages-sous-influence

(2) Voir le décryptage publié par les Amis de la Terre et leurs partenaires après le passage au Conseil d’Etat : http://www.amisdelaterre.org/Mettre-fin-aux-energies-fossiles-Decryptage-de-la-loi-Hulot.html

et leur communiqué de presse de réaction lors de l’adoption finale de la loi : http://www.amisdelaterre.org/Loi-Hulot-trop-d-exemptions-et-pas-assez-d-ambition-pour-etre-une-loi.html

(3) La lettre de réponse du Conseil d’Etat et les contributions des lobbies sont disponibles ici : http://www.amisdelaterre.org/IMG/pdf/loi_hulot_contributions_lobbies_au_conseil_etat.pdf

(4) Article disponible également en ligne ici : http://www.amisdelaterre.org/Decryptage-comment-les-lobbies-ont-detricote-la-loi-Hulot-via-le-Conseil-d-Etat.html

(!) Info minute – Revue de Presse

Il y a huit ans, sous la pression de ses actionnaires, la société avait promis de cesser de financer le déni du changement climatique. Mais les preuves financières et fiscales révèlent une histoire bien différente. ExxonMobil a fait don de plus de 2,3 Millions de $ (2,1 Millions d’Euros) aux membres du Congrès et à un groupe de lobbying des entreprises qui nient le changement climatique et bloquent les efforts pour lutter contre le changement climatique. Ceci huit ans après avoir promis d’arrêter de financer de déni du changement climatique. C’est ce que rapporte le journal britannique The Guardian.

Le pipeline de dollars alimente les conservateurs climatosceptiques et leur discours

Le déni du changement climatique – de la part des Républicains au Congrès et des groupes declimate change diny pression effectuant leur lobbying au niveau de l’État – est considéré au États-Unis comme un obstacle majeur aux efforts mondiaux pour lutter contre le changement climatique. Ils condamnent la possibilité d’établir des règlements fédéraux et d’État visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et la possibilité de planifier un avenir qui connaitra une forte élévation du niveau de la mer et des conditions météorologiques extrêmes.

Selon un décompte fait par Greenpeace, c’est environ 30 millions de dollars (27,5 M d’Euros) qu’Exxon à injecté pour financer les chercheurs et les groupes militants faisant la promotion de la désinformation sur le réchauffement climatique. En réponse à la pression d’actionnaires, en 2007 la compagnie pétrolière a promis de stopper un tel financement.

« En 2008, nous cesserons nos contributions financières à plusieurs groupes d’intérêt public dont la position sur le changement climatique pourrait détourner l’attention de l’important débat sur la façon dont le monde va sécuriser l’énergie nécessaire à la croissance économique d’une manière respectueuse de l’environnement», déclarait Exxon dans son rapport de 2007.

Mais depuis 2007, selon l’information financières et fiscale disponible, la compagnie pétrolière a versé 1,87 Millions de $ aux Républicains du Congrès, lesquels nient l’existence du changement climatique, ainsi qu’un montant supplémentaire de $ 454 000 à la l’American Legislative Exchange Council (Alec), une association regroupant élus conservateurs et représentants du secteur privé particulièrement active dans la défense des intérêts des compagnies avec une vision très libérale des échanges et un marché dérégulé.

Dans une déclaration au Guardian cette semaine, Richard Keil le porte-parole d’Exxon réitérait: « ExxonMobil ne finance pas le « déni climatique »« .

Le changement climatique « un canular », les émissions de carbone « un élixir de vie »

L’ALEC, ce groupe de pression ultra-conservateur, a accueilli des séminaires faisant la promotion de l’idée (discréditée depuis longtemps) que l’augmentation des émissions de dioxyde de carbone est un « élixir de vie » (sic !). L’ALEC est également instigatrice d’une loi interdisant aux planificateurs de l’Etat de Caroline du Nord de considérer l’élévation future du niveau de la mer…

En somme, le soutien d’Exxon aux membres du Congrès et aux groupes de pression qui nient le changement climatique est en parfaite contradiction avec la position publique de la compagnie qui se dit déterminée à agir contre la menace posée par le réchauffement climatique.

Selon le Center for American Progress (think tank progressiste), une majorité de républicains à la climatosceptiqueChambre des représentants et au Sénat nie le changement climatique ou s’oppose aux proposions de mesures pour lutter contre le changement climatique. Les bénéficiaires d’Exxon au Congrès incluent par exemple le sénateur de l’Oklahoma Jim Inhofe, qui qualifie le réchauffement climatique de canular, et qui a reçu $ 20.500 depuis 2007, selon la base de données « Dirty Energy Money » (Argent sale de l’énergie) alimentée par Oil Change International. Moins efficace, Exxon a financé le sénateur du Missipi Roger Wicker, qui fut le seul à rejeter une déclaration votée au Sénat affirmant que le changement climatique était bien réel et non pas un canular : La résolution a été adoptée à 98 contre 1. Wicker, qui a reçu $ 14 000 d’Exxon est en effet celui qui a voté non.

Distribution générale de billets de 100 dollars par paquets de 50

Exxon a également donné un total de $ 868 150 aux sénateurs républicains lesquels ont votéstop corruption stop gaz de schiste contre une autre résolution symbolique affirmant que l’activité humaine était un moteur important du changement climatique. Chacun des 49 sénateurs républicains qui ont voté « non » a reçu au moins $ 5000 de la part d’Exxon, selon les chiffres d’Oil Change.

Fondateur du « Centre pour l’étude du dioxyde de carbone et le changement global », Craig Idso déclarait lors d’une réunion devant 100 parlementaires que « l’augmentation continue du dioxyde de carbone dans l’atmosphère devrait être accueillie à bras ouverts ». Si de telles fariboles sont pourtant rejetées dans leur intégralité par la communauté scientifique, l’ALEC considère que « tous les points de vue sont les bienvenus et qu’aujourd’hui, les élus en charge de l’établissement des réglementations veulent apprendre d’autant de points de vue que possible afin de prendre la meilleure décision possible pour les gens qu’ils représentent ».

Certaines compagnie finissent par se désolidariser

Championne du lobbying climatosceptique, l’ALEC a pourtant fini par subir une série de défections liées à sa prise de position sur le changement climatique au cours de la dernière année : des sociétés comme News Corp du magnat Rupert Murdoch, BP America, Microsoft, Facebook et Yahoo ont renoncé à leur statut de membres. Google se désolidarisant également accuse le groupe de lobbying de mentir sur le changement climatique.

Quant à Exxon, interrogée par le Guardian, elle n’est pas prête à discuter de son appartenance à l’ALEC. Toutefois, la société déclare être sérieuse par rapport au changement climatique et ne pas financer le déni climatique. Dans un courriel, M. Keil, le porte-parole d’Exxon, poursuit : « Nous prenons des mesures en réduisant les émissions de gaz à effet de serre dans nos opérations, en aidant les consommateurs à réduire leurs émissions, et en soutenant les grandes universités américaines en augmentant la capacité de recherche à la fois concernant la réduction des émissions mais aussi sur les sources d’énergie alternatives ». M. Keil n’a toutefois pas voulu répondre aux questions précises concernant le soutien financier d’Exxon aux membres du Congrès qui nient le changement climatique, son soutien à l’ALEC ni au financement du séminaire dans lequel Craig Idso faisait ses stupéfiantes déclarations sur les bénéfices supposés de l’augmentation des émissions de carbone.

Et pour conclure, le porte parole d’Exxon de déclarer : « Parce que le Guardian a abandonné le journalisme objectif et a un agenda clair en ce qui concerne le changement climatique, on ne peut plus lui faire confiance pour faire le travail que ses lecteurs ont le droit d’attendre, celui de fournir une couverture exacte et impartiale sur ce sujet important ».

Le financement du discours niant le changement climatique par les compagnies du secteur énergétique est considéré comme un obstacle majeur à l’action des États-Unis sur le changement climatique – et divise les États-Unis et l’Europe dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Source: The Guardian