(!) Info minute revue de presse
Traduit par nos soins – Article de David Suzuki paru sous le titre Fracked Gas: A Bridge Fuel to Nowhere dans Ecowatch le 30.05.2013
La Colombie-Britannique[1] semble fonder ses espoirs (de développement) économiques sur le gaz naturel en grande partie obtenu par la fracturation hydraulique. Alors que le monde devrait être en train de faire sa transition des énergies fossiles vers les énergies propres et à la protection de l’environnement, nous sommes prêts à nous enterrer plus profondément dans le trou de carbone du changement climatique.
S’inspirant de la politique de liquidation du gouvernement de l’Alberta et du gouvernement fédéral, les dirigeants de la Colombie-Britannique veulent extraire les combustibles fossiles du sous-sol, les transporter vers la côte, les liquéfier et les expédier vers l’Asie ou partout où ils pourront trouver acheteur et aussi rapidement que possible. Il s’agit là d’un plan à court terme basé sur un mode de pensée révolue. À long terme, ce n’est bon ni pour l’économie ni pour l’environnement.
Que les politiciens imaginent que les ressources en combustibles fossiles soient infinies ou qu’ils ne puissent penser qu’en fonction de la prochaine échéance électorale, ils vendent notre avenir et laissent un héritage désastreux pour nos enfants et petits-enfants. Pour commencer, le gaz naturel n’est pas la solution d’énergie propre telle qu’elle est souvent présentée. Selon l‘Institut Pembina[2] , si seulement cinq des 12 terminaux de GNL[3] proposés étaient construits sur la côte de la Colombie-Britannique, ils pourraient cracher 63 millions de tonnes de carbone par an dans l’atmosphère ce qui dépasse le volume actuellement produit par l’exploitation des sables bitumineux de l’Alberta et qui l’équivalent de la totalité des émission de gaz à effet de serre de toute la Colombie-Britannique en 2010. Les composés organiques volatiles et les particules rejetées dans l’atmosphère seraient également de nouvelles sources importantes de pollution.
La liquéfaction du gaz pour l’exportation, qui nécessite d’énormes quantités d’énergie, n’est pas la seule source de gaz à effet de serre. Les fuites -ou ce que l’industrie appelle les « émissions fugitives« – au cours des forages, de l’extraction et du transport sont également des préoccupations. Bien que le ministère de l’Environnement de la Colombie-Britannique affirme que de 0,3 à 0,4 pour cent du gaz s’échappe dans l’atmosphère, des études indépendantes indiquent que c’est en fait de nombreuses fois ce montant.
Selon un article paru dans la revue Nature, des scientifiques de l’US National Oceanic and Atmospheric Administration et l’Université du Colorado ont trouvé que les fuites de méthane -un gaz à effet de serre 20 fois plus puissant que le dioxyde de carbone- représentent quatre à neuf pour cent de la production totale dans deux champs gaziers aux États-Unis[4].
Même les retombées économiques de ces projets de GNL dans la province peuvent être mises en doute. De nombreux analystes s’attendent à un ajustement des prix, et l’expert en GNL Peter Hughes disait à la CBC News que la manne espérée était un «vœu pieux», car la Colombie-Britanique sera en concurrence avec les producteurs d’autres pays et régions comme le Qatar, l’Afrique de l’Est et l’Australie. Et la majeure partie de cet argent ne bénéficierait même pas à la Colombie-Britannique, puisque de nombreuses compagnies gazières sont originaires d’autres provinces ou étrangères. Quant aux emplois, l’extraction du gaz naturel , son transport et sa production en créent relativement peu en comparaison de tous les autres secteurs de l’économie, y compris le tourisme, les sciences et la technologie, les soins de santé, l’éducation et les petites entreprises.
En plus de cela, la fracturation hydraulique – l’injection d’eau, de sable et de produits chimiques à haute pression dans le sol pour éclater le schiste et libérer le gaz naturel- a bien d’autres conséquences environnementales. Elle exige d’énormes quantités d’eau, contamine l’eau potable, endommage l’habitat et les écosystèmes et provoque même des micro-séismes !
En plus de voir le gaz naturel comme une panacée économique, certains estiment qu’il pourrait s’agir d’un « carburant de transition « , quelque chose de plus propre que le pétrole ou le charbon à utiliser tandis que nous ferions la transition vers les énergies renouvelables. Il s’agit-là d’une transition pleine de danger, et le subventionnement et l’investissement dans l’extraction et les infrastructures de gaz naturel sans véritable engagement à nous sevrer du pétrole, du charbon et du gaz nous maintient sur la voie des énergies fossiles et décourage les investissements dans l’énergie propre et la protection de l’environnement.
L’industrie s’appuie également sur l’argent des contribuables pour subventionner, par l’impôt et des cadeaux fiscaux, la fourniture de l’eau, les routes ainsi que les énormes quantités d’énergie nécessaires pour liquéfier le gaz. Et les « émissions fugitives » provenant de l’exploitation du gaz sont exonérées de la taxe carbone. Si nous sommes vraiment en «transition» pour réduire les énergies fossiles, pourquoi subventionnerions-nous les coûts en carbone des entreprises?
Il est temps d’investir notre argent et nos ressources humaines dans des idées novatrices à long terme qui permettront de créer de bons emplois durables et assurer que nous, nos enfants et nos petits enfants continueront de jouir d’une vie saine et prospère tandis que notre magnifique environnement sera protégé. Nous avons d’abondantes ressources renouvelables et les possibilités d’économiser l’énergie et de montrer la voie dans le développement de l’énergie propre. Il est temps d’aller de l’avant.
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A propos de l’auteur : Le Dr. David Suzuki est un scientifique, animateur radio, auteur et co-fondateur de la Fondation David Suzuki . Il est Compagnon de l’Ordre du Canada et récipiendaire du Prix Kalinga pour la science, de la médaille du Programme pour l’Environnement des Nations Unies, le Right Livelihood Award 2009 et du Global 500 de l’UNESCO. M. Suzuki est professeur émérite à l’Université de la Colombie-Britannique à Vancouver et détient 27 diplômes honorifiques d’universités du monde entier. Il est connu des téléspectateurs comme animateur de l’émission de télévision de la CBC The Nature of Things, ainsi que des auditeurs ; il fut à l’origine de l’émission Quirks and Quarks de CBC Radio, ainsi que de la série plébiscitée It’s a Matter of et From Naked Ape to Superspecies. Son œuvre écrite comprend plus de 52 livres, dont 19 pour les enfants. Dr. Suzuki vit avec sa femme, le Dr Tara Cullis, et sa famille à Vancouver, Colombie-Britanique
[1] Ndt : La Colombie-Britannique, est la plus occidentale des provinces canadiennes
[2] Ndt : Plus d’information sur l’Institut Pembina ici
[3] Ndt : GNL : Gaz naturel liquéfié
[4] Ndt : Voir également à ce sujet Comment une nouvelle étude remet sérieusement en cause l’affirmation selon laquelle le gaz naturel est un carburant propre et Les fuites de méthane lors de la production peuvent annuler les avantages climatiques du gaz naturel.
Les bénéficiaires du « nouvel ordre mondial » ne reculeront devant aucun profit potentiel. Peu leur importe les retombés, vu qu’ils s’en dégagent avec un cynisme monstrueusement humain.
Les crises, à répétition, et les guerres, de « pré carré », sont des moyens immondes qui ne cessent d’être employés. Alors lâcher une source de revenu comme les gaz et huiles de schistes et hors de question pour eux.
Les diverses pollutions qu’ils ont générés ne les dérangent que dans la mesure où les conséquences risquent de limiter leurs sacro-saint profits.
Cet « ordre mondial » à des relents nauséabonds voir putrides. Celui du féodalisme, à l’échelle planétaire.