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En France, le lobby pro-gaz de schiste ne manque pas de ressources pour monopoliser le débat. Il a récemment musclé son dispositif de communication de manière inquiétante. En manipulant les vrais enjeux soulevés par le sujet.
Il faut se rendre sur place pour comprendre : aux Etats-Unis, les gaz de schiste ouvrent une nouvelle ère pour les énergies fossiles. Soutenus par le gouvernement fédéral, les industriels voient dans ce nouveau réservoir la clé d’une véritable révolution énergétique. A l’inverse du gaz conventionnel, les ressources en gaz de schiste sont mieux réparties sur le globe. Les chiffres manquent encore de précision, mais l’Agence internationale de l’énergie (AIE) estime le sous-sol français (particulièrement le bassin parisien et le sud-est du pays) comme l’un des plus prometteurs.
Aussi, les compagnies gazières expliquent-elles au public et aux décideurs politiques qu’une «exploitation propre» est possible : les dizaines de millions de litres d’eau polluée, les fuites de méthane ou autres impacts irréversibles sur l’environnement inhérents à la fracturation hydraulique ne seraient bientôt que de vieux souvenirs. Mais ces affirmations sont peu crédibles pour ceux qui ont pu approcher un site d’exploitation et constater les dégâts.
La réalité est en effet tout autre : les multinationales tentent de confisquer un débat plus large dont les conclusions nous engagent à très long terme. Focaliser les discussions sur les aspects techniques de l’exploitation des gaz de schiste, c’est admettre implicitement la nature acceptable de cette ressource. La véritable interrogation ne concerne-t-elle pas plutôt la place des énergies fossiles dans les politiques économiques et écologiques de demain ?
Car le débat est profondément politique, au sens le plus noble du terme : seule l’absence de considération des enjeux climatiques et durables expliquerait qu’on accepte de développer ce type d’énergie fossile en France. Le positionnement de nos dirigeants sur ce sujet sera un puissant révélateur du projet de société réellement souhaité par notre classe politique.
Les prochains mois seront le cadre de deux événements importants. Mi-septembre aura lieu la conférence environnementale pilotée par le ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie. Quelques semaines plus tard, le gouvernement présentera un projet de loi de réforme du code minier. Dans ces conditions, on comprend aisément l’importance du lobbying développé depuis quelque temps par les industriels du secteur. D’ailleurs, l’arsenal propagandiste pourrait rapidement s’étoffer. Au programme ? Des notes orientées envoyées aux cabinets des élus, des voyages de presse formatés proposés aux journalistes, une campagne de communication largement déployée sur les réseaux sociaux… Nous pourrions même assister à la naissance de comités d’experts destinés à rendre des avis positifs sur les gaz de schiste en dénonçant des opposants trop idéologues !
Or les arguments avancés ne tiennent pas, et plusieurs éléments doivent attirer notre attention. Le marché européen des gaz de schiste est fort différent de celui des États-Unis. Une étude réalisée en décembre 2010 par l’Oxford Institute for Energy Studies et validée par l’AIE démontre que le coût d’exploitation et de développement des gaz non conventionnels serait deux à trois fois plus élevé en Europe qu’aux États-Unis. Dans le meilleur des scénarios, pour des raisons géologiques et juridiques, le prix serait proche du gaz russe importé et supérieur au prix des gaz provenant d’Afrique et du Moyen-Orient.
Par ailleurs, il existe aujourd’hui sur le marché des leviers d’action alternatifs beaucoup plus puissants pour notre développement économique. Une autre voie, articulée autour des économies d’énergie et des énergies renouvelables, présente le considérable avantage d’intégrer deux éléments fondamentaux : la finitude des ressources de notre planète et la fragilité des équilibres naturels dont nous dépendons. Partout où les gaz de schiste sont exploités, les autres modes de production énergétiques sont gravement menacés. Aux États-Unis par exemple, l’engouement pour l’exploitation du gaz non conventionnel se fait au détriment du nucléaire ou du charbon, qui ne peuvent s’aligner sur les prix bas de cette ressource.
Mais les principales victimes sont les énergies renouvelables qui, en plein essor, ont besoin d’un soutien politique sans faille et d’un cadre réglementaire stable et ambitieux pour arriver à supplanter les énergies fossiles. Aussi avons-nous de quoi nous inquiéter pour notre avenir, si les choix qui s’offrent à nous aujourd’hui ne sont pas considérés comme des choix de civilisation.
Le partage votre opinion sur le fond du débat fossile/renouvelable. Le nouveau film de Josh Fox, auteur de GASLAND, a le mérite de nous confirmer les craintes technologiques qui seront débattues : http://goo.gl/TlDDH